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Accord de libre-échange UE-Tunisie: la révolution tunisienne n’est pas une marchandise

Le Parlement européen se prononçait, le jeudi 25 février, sur l’ouverture des négociations du nouvel accord de libre échange entre l’Union européenne et la Tunisie, qui vise à approfondir le périmètre des accords précédents. Tribune de Karima DELLI, Michèle RIVASI, Eva JOLY, Pascal DURAND, José BOVÉ, Yannick JADOT et Philippe LAMBERTS sur cet accord publiée sur le Huff Post.
Le Parlement européen se prononce, ce jeudi 25 février, sur l’ouverture des négociations du nouvel accord de libre échange entre l’Union européenne et la Tunisie, qui vise à approfondir le périmètre des accords précédents. Cet ALECA (accord de libre échange complet et approfondi) porte sur des pans entiers de l’économie tunisienne: agriculture, industrie, services, marchés publics, tout ce qui touche de près ou de loin à l’environnement des affaires.

Comme trop souvent, cet accord de libre échange, lancé par la Commission européenne en octobre 2015, se négocie dans un climat beaucoup trop opaque, à l’instar du TTIP, du CETA, du TISA. De l’autre côté de la Méditerranée, l’opinion publique et le pouvoir législatif ne sont pas correctement informés du contenu des négociations, alors que celles-ci vont impacter l’ensemble de la vie économique et politique tunisienne. Il est par conséquent urgent que toute la lumière soit faite sur ces négociations afin que l’ensemble des citoyens, tant européens que tunisiens, puissent savoir ce qu’en leur nom la Commission négocie avec Tunis. C’est une exigence démocratique minimum!

On nous rétorquera que ces négociations ne sont pas nouvelles et qu’en 1995, la Tunisie a été le premier pays méditerranéen à signer un accord d’association avec l’UE. Justement, c’est bien là que le bât blesse! Il serait grand temps que nous tirions les leçons de nos erreurs passées, si l’UE est réellement prête à, comme elle prétend, contribuer à la préservation du « modèle tunisien ». Rappelons que jusqu’à la Révolution du jasmin qui a provoqué le départ du président dictateur Zine el-Abidine Ben Ali le 14 janvier 2011, la libéralisation de l’économie tunisienne en partenariat privilégié avec Bruxelles a principalement profité à la kleptocratie de la famille Ben Ali-Trabelsi et ses affidés qui ont amassé une fortune considérable sur le dos de la population. De plus, le modèle économique tunisien alors si souvent vanté et promu dans les couloirs de Bruxelles, basé sur le développement de masse du tourisme balnéaire à bas prix, a entraîné d’immenses disparités de développement régional. Ainsi tandis que la côte tunisienne se développait, l’intérieur des terres, et notamment tout l’ouest du pays, se voyait abandonné par le pouvoir central. Or c’est du centre du pays, depuis la ville de Sidi Bouzid, que les mouvements sociaux à l’origine de la révolution tunisienne ont débuté, jusqu’à s’étendre à l’ensemble du territoire. Aujourd’hui, ces inégalités régionales ne sont absolument pas réglées: les grèves et les manifestations, à l’initiative notamment des jeunes « diplômés chômeurs », se multiplient dans des villes comme Kasserine, et la situation économique locale dramatique nécessiterait des investissements publics considérables, non pas la libéralisation des marchés publics dans des conditions de négociation totalement inégalitaires entre Bruxelles et Tunis. Comme si ces difficultés n’étaient pas suffisantes, la Tunisie vit sous menace terroriste permanente, après deux terribles attentats en 2015 revendiqués par Daech, dont celui de juin qui a touché un hôtel touristique à Sousse et frappé très durement un secteur économique clef (le tourisme représente 7% du PIB tunisien). Bref tous les voyants sont au rouge.

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