Ce qui permettrait vraiment de reprendre la main sur la finance

9 mai 2012
Contrairement à ce que l’actuel président de la République a voulu faire croire, la France n’est pas toujours en pointe dans les débats européens sur la réglementation financière. Je ne donnerai ici qu’un seul exemple : en tant que négociateur de la directive sur les bonus en 2010 (CRD3), j’ai pu constater que la France était, avec le Royaume-Uni et l’Italie, le pays qui défendait les règles les moins contraignantes possibles pour les traders. A l’inverse, l’Allemagne soutenait la position qui était également majoritaire au Parlement européen, à savoir le fait que le bonus ne puisse pas dépasser le niveau du salaire fixe. Or ce sujet est de nouveau sur la table des négociations puisque l’Autorité bancaire européenne a montré récemment que les banques ne respectaient pas les nouvelles règles adoptées en 2010. Un changement de majorité en France permettrait de nouer une alliance avec l’Allemagne et la majorité du Parlement européen, isolant ainsi le Royaume-Uni.

Le deuxième sujet en cours de négociation sur lequel l’alternance en France ouvrirait de nouvelles perspectives est celui de la réglementation bancaire, et notamment la question non résolue des banques « trop grosses pour faire faillite et trop grosses pour être sauvées », comme BNP Paribas, dont l’actif est quasiment équivalent au PIB de la France. L’opposition farouche de l’actuel gouvernement français à la séparation des banques d’affaires et des banques de dépôt comme à l’introduction d’une « Volcker rule » européenne limitant le trading pour compte propre des banques, a bloqué toute initiative. Si le nouveau gouvernement entre dans une autre logique, une alliance est possible, cette fois-ci avec le Royaume-Uni, pour faire bouger les lignes notamment au sein de la commission Liikanen mise en place par Michel Barnier, le commissaire européen chargé des Services financiers, qui travaille sur cette réforme en ce moment même.

Le troisième sujet est bien sûr la taxe sur les transactions financières. La taxe décidée par Nicolas Sarkozy n’est qu’un écran de fumée et se révèle contre-productive dans le débat européen. Elle vient en effet concurrencer le projet de la Commission, qui porte sur une assiette beaucoup plus large, susceptible de collecter 55 milliards d’euros dans les 27 Etats de l’Union. D’ailleurs les libéraux allemands ne s’y sont pas trompés : alors qu’ils sont farouchement opposés à la taxe dans la version de la Commission européenne, ils sont favorables à la version française, qui ne permettra de collecter que de 200 à 300 millions d’euros. La priorité en cas d’alternance sera donc de soutenir la version européenne de la taxe, quitte à la mettre en place sous forme de coopération renforcée en cas de refus du gouvernement britannique. Comme il s’agit d’une des conditions posées par le SPD et les Grünen en Allemagne au vote du traité budgétaire, les conditions politiques seront réunies pour enterrer la « taxe Sarkozy » et revenir au projet plus ambitieux de la Commission européenne.

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Un commentaire

  • cheryk dit:
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    Article très instructif. Pourquoi la presse ne parle pas plus de tous ces sujets, de ce qui est vraiment en débat au Parlement Européen ? Les positions des différents pays sont donc bien éloignées de ce qui est présenté dans le tumulte des infos.

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