Crise économique : Un sommet certainement pas encore à la hauteur !

13 décembre 2011
Le savoir faire médiatique de Nicolas Sarkozy consiste à faire passer comme « historique » tout événement qui survient dans le cadre des discussions sur la crise économique entre les gouvernants de l’Europe. A la longue, cette ficelle électoraliste devient vraiment grosse, surtout, qu’en l’occurrence, les conclusions du « sommet européen » des 9 et 10 décembre sont d’une portée encore bien trop faible.
En réalité, le seul fait nouveau de ce sommet a été la mise en congé de la Grande Bretagne vis à vis de l’Union Européenne par David Cameron. Cela ne fait que confirmer la force du sentiment eurosceptique dans les rangs conservateurs britanniques, ainsi que le poids de leur secteur financier et bancaire surpuissant et refusant toute régulation, mais cela ne peut constituer en rien une avancée vers les solutions à mettre en œuvre pour juguler la crise économique qui ébranle l’Europe. Tout au plus, l’isolement de la Grande Bretagne, qui n’a pu entraîner aucun autre État membre dans son sillage, est un signal positif pour continuer à travailler.

Au centre de l’effet d’annonce de Nicolas Sarkozy, il y a la très instrumentalisée « règle d’or » concernant les budgets des États, « règle d’or » que le candidat sortant agite en permanence pour mettre en difficulté ses opposants socialistes. Or, cette règle d’or est très exactement ce que l’on peut appeler une mesure pour amuser la galerie. Elle reprend en effet sous la forme la plus basique qui soit les conditions de l’équilibre budgétaire d’un État, conditions sine qua non pour commencer à réduire sa dette, car, sinon, le déficit de l’année en cours s’ajoutant à ceux des années précédentes, la dette cumulée ne peut que croître encore.

Mais, si ce n’est pour faire espérer une remontée de Sarkozy dans les sondages, il ne faut attendre du vote solennel de cette règle par les différents États-membres de la zone euro aucune efficacité réelle. Mieux, si on se place en situation d’avant la crise, en 2008, l’Irlande ou l’Espagne étaient parfaitement respectueux de la fameuse « règle d’or », tandis que la France et l’Allemagne l’avaient déjà allègrement transgressée, l’Allemagne pour le niveau de sa dette publique, la France pour tout ou presque (dette publique, déficit budgétaire, etc…). Trois ans plus tard, les « excellents élèves » irlandais ou espagnols de 2008 sont descendus aux enfers, la France résiste encore, et l’Allemagne a démontré que sa dette largement au dessus des 60% de Maastricht n’avait entamé en rien sa bonne santé économique.

Que la rigueur budgétaire soit une nécessité, nul ne peut le contester. Mais qu’elle soit une solution, c’est manifestement tromper les gens que de l’affirmer. C’est la relance de la machine économique qui doit intervenir si on veut sortir de la crise, et le préalable à cette relance est de mutualiser la dette européenne à travers les eurobonds, les obligations européennes dont les taux d’intérêt seront bien plus bas que ceux que payent actuellement les pays les plus en difficulté. Si l’Europe a les moyens de cette mutualisation, c’est bien sûr grâce à l’Allemagne et aux pays les plus riches, ceux dont la balance des paiements est très largement positive. Pour qu’ils s’engagent, il faut qu’ils aient confiance dans la gestion future de l’Europe, et Angela Merkel veut placer cette confiance dans les mains de l’Union Européenne, tandis que Nicolas Sarkozy, à l’instar d’un David Cameron, s’insurge contre cette « perte de souveraineté des Etats ».
Le sommet s’est donc terminé sans conclusion véritable, mais il a constaté que nul, à part les Anglais, n’avait de « plan B » pour l’avenir. Et encore, beaucoup s’opposent, en Grande Bretagne même, à la stratégie isolationniste du premier ministre britannique, à commencer par le gouvernement nationaliste écossais d’Alex Salmond. L’Union est donc maintenue, mais elle n’est pas encore arrivée, loin de là, à proposer des solutions pérennes.

En fait la crise européenne se réglera par étapes car tous les ajustements ne peuvent se faire d’un coup. Premier temps : la remise en ordre des pays en faillite ou en risque de faillite par des mesures économiques très dures, dont six gouvernements ont déjà fait les frais : Irlande, Portugal, Grèce, Slovaquie, Italie et désormais Espagne. Deuxième temps : mise en place des dispositifs de garantie de la rigueur de la gestion budgétaire future des États de l’Union Européenne, ce qui suppose un mécanisme de contrôle européen qui fait se cabrer les souverainistes de tous poils, Nicolas Sarkozy en tête. C’est la phase actuelle, préalable à la mise en place des obligations européennes dont le taux, suffisamment bas, donnera un oxygène financier à long terme aux pays les plus en difficulté pour financer leur dette, particulièrement l’Italie. Les progrès sont difficiles, et mettent à l’épreuve l’Union Européenne. Mais ils sont inéluctables, car c’est l’intérêt de tous de parvenir à un accord. Et tout l’art du « grand communicateur » Nicolas Sarkozy consiste à se poser en acteur de cet négociation alors même qu’il en ralentit systématiquement le rythme.

Puis viendra le temps des grandes politiques de relance pour trouver l’essor économique nécessaire pour redonner de l’activité et de l’emploi. Pour cette politique de relance, il y a une priorité évidente, c’est le bassin méditerranéen. Elle doit s’imposer dans l’aire méditerranéenne de l’Europe, car c’est là que les taux de chômage ont dépassé les limites du supportable. Et elle doit s’imposer pour le reste du bassin méditerranéen, car il est indispensable de répondre à l’appel lancé par les révolutions démocratiques qui ont eu lieu sur l’autre rive.

Dans ce contexte général, la Corse peut trouver sa place.

François ALFONSI

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