L’Europe a perdu la bataille de Copenhague sur le climat

20 décembre 2009
Par Reuters, publié le 19/12/2009 à 13:40

COPENHAGUE – L’Europe, marginalisée par les Etats-Unis et les grands pays émergents, Chine en tête, a perdu la bataille du sommet de Copenhague sur le climat, qui se déroulait pourtant sur son sol.
L’Europe, marginalisée par les Etats-Unis et les grands pays émergents, Chine en tête, a perdu la bataille du sommet de Copenhague sur le climat. Au-delà d’un revers collectif pour l’Union européenne, c’est un revers personnel pour Nicolas Sarkozy et, dans une moindre mesure, pour le Premier ministre britannique Gordon Brown, qui se sont beaucoup impliqués dans la quête d’un accord ambitieux. (Reuters/Ints Kalnins)

Le président français avait tapé du poing sur la table jeudi pour réclamer une réunion de crise des principaux dirigeants de toutes les régions du monde pour débloquer les négociations.

C’est lui qui avait fait le forcing, lors de la présidence française de l’UE en 2008, pour que les 27 adoptent un « paquet énergie-climat » censé en faire les pays les plus vertueux de la planète en matière de développement durable.

Le président français a multiplié ces dernières semaines déplacements et rencontres pour constituer un front commun UE-pays pauvres et émergents face aux Etats-Unis et à la Chine.

Mais les Européens ont finalement dû accepter un accord a minima, qui ne reprend ni l’objectif d’une réduction globale de 50% des émissions de gaz à effet de serre (GES) d’ici 2050, ni l’idée d’une organisation mondiale de l’environnement.

Camouflet supplémentaire: les 193 pays participants se sont bornés samedi à « prendre note » sans l’entériner de « l’accord de Copenhague », scellé la veille en réunion restreinte de crise.

La stratégie d’alliance de la France et de l’UE avec les pays africains, certains grands émergents comme le Brésil et le Mexique, les pays les plus pauvres d’Asie comme le Bangladesh et les petits Etats insulaires, n’a pas résisté au refus de la Chine et de l’Inde d’accepter un accord contraignant.

Pire, c’est le président américain Barack Obama, dernier arrivé à Copenhague et longtemps accusé d’être un frein à un tel accord, qui a pu se présenter vendredi en sauveur du sommet.

« J’ai travaillé toute la journée avec le Premier ministre éthiopien Meles (…), le Premier ministre chinois Wen, le Premier ministre indien Singh, le président Lula du Brésil et le président Zuma d’Afrique du Sud pour arriver à ce que je crois une importante étape », a-t-il expliqué lors d’une conférence de presse, le soir, avant de reprendre l’avion pour Washington.

Barack Obama n’a fait allusion à l’Europe qu’en évoquant les efforts de « ses proches alliés ». Peu auparavant, entre 20h30 et 21h00, il était allé présenter à une demi-douzaine de dirigeants européens réunis autour de Nicolas Sarkozy, Gordon Brown et la chancelière allemande Angela Merkel, l’accord qu’il venait de conclure avec la Chine, l’Inde, le Brésil et l’Afrique du Sud.

« VICTOIRE POSTHUME DE BUSH »

« Nous payons le prix d’avoir la Chine et les Etats-Unis à bord. Nous ne pouvions pas avoir l’un sans l’autre », commente l’ambassadeur de France pour le climat, Brice Lalonde.

Nicolas Sarkozy et ses partenaires européens se sont efforcés de faire bonne figure en présentant ce compromis comme un accord certes imparfait mais positif.

« Si on veut être efficace, il faut emmener tout le monde et (…) il faut accepter de faire des compromis », a expliqué le président français, tandis que ses conseillers, le ministre de l’Environnement Jean-Louis Borloo et la secrétaire d’Etat à l’Ecologie Chantal Jouanno faisaient plutôt grise mine.

Pour les écologistes Yves Cochet et Yannick Jadot, présents à Copenhague, le résultat est désastreux.

« L’Europe, qui voulait être à la fois la plus vertueuse et le leader, n’a pas réussi à influencer le texte dans le bon sens », souligne le député vert de Paris, qui dénonce une « incapacité d’anticipation lamentable ».

Yannick Jadot déplore une « crise de leadership » au sein de l’UE. « Les jeux d’ego de Sarkozy, Brown et Merkel ont créé d’énormes tensions », a-t-il déclaré à Reuters.

Pour le député écologiste au Parlement européen et ancien responsable de Greenpeace, l’Europe a raté l’occasion de reprendre le leadership sur les questions climatiques.

« C’est un peu la victoire posthume de (l’ancien président américain) George W. Bush », a-t-il dit à Reuters.

Il dénonce aussi « l’absence pathétique de courage politique » des chefs d’Etat et de gouvernement européens et américain, qui ont regagné dès vendredi soir leur pays sans venir défendre l’accord conclu à 26 devant les délégués des 166 autres pays.

« Ils ont voulu faire croire qu’il y avait un accord. Ils ont fait les coqs mais sont sortis par la petite porte », souligne le député européen, qui accuse en outre Nicolas Sarkozy d’avoir « aligné les contre-vérités » pendant sa conférence de presse.

Il reste à l’Europe l’acquis du « paquet énergie-climat ». Selon le président français, les Européens ont en outre décidé de se doter d’une Organisation européenne de l’Environnement, qui « aura vocation à accepter les candidatures de tous les pays qui voudront participer à ces travaux ».

Nicolas Sarkozy a également assuré que l’UE porterait bien son objectif de réduction de ses émissions de GES de 20% à 30% en 2020 par rapport à 1990, en fonction des engagements qui seront pris par les autres pays du monde en janvier.

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