La « COP des avions » bat de l’aile

2 octobre 2016
Mardi 27 septembre, à Montréal, se sont ouvertes les négociations finales de l’Organisation de l’Aviation Civile Internationale (OACI) qui doivent sceller un accord climatique pour le secteur de l’aviation d’ici deux semaines. Après des mois de négociation, Karima DELLI juge la séquence cruciale pour le climat car elle peut à elle seule ruiner l’élan créé lors de la COP21.
Pour Karima DELLI, députée européenne, membre de la Commission Transports du Parlement européen :

« Les accords de Paris du 12 décembre 2015, même s’ils poursuivent un objectif global « de contenir l’élévation de la température moyenne de la planète nettement en dessous de 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels », ont exclu les secteurs aérien (et maritime) des négociations. Or le secteur aérien pèse 3% des émissions mondiales. C’est aussi un secteur en pleine dynamique, qui croît de 5% par an et dont les émissions pourraient être multipliées par 7 d’ici 2050 par rapport aux niveaux de 1990 si rien n’est fait pour en limiter l’augmentation. Vu la taille du secteur, un mauvais accord donc serait incompatible avec l’atteinte des objectifs de la COP21.

Pourtant, les négociations menées par l’OACI à Montréal, ont lieu sans aucune publicité, sans aucune transparence. De fait, ces négociations secrètes se font entre les représentants des pays et l’industrie, c’est dire si le lobby de l’aviation y pèse de tout son poids.

Quel chemin prennent les négociations? Les députés européens ont appris très tard -le 1er septembre 2016- le mandat de négociation que s’est donnée l’Union européenne, les Etats-membres continuant quant à eux de cacher leur jeu. A l’heure actuelle, il est encore question d’avoir un système d’échange mondial de quotas d’émission de gaz à effet de serre pour le secteur aérien, comme c’est déjà le cas en Europe pour les vols intra-européens depuis 2008. Mais deux risques pèsent sur l’établissement de ce marché carbone : celui d’aboutir à un système d’échange peu contraignant et moins performant que le système européen actuel, ce qui obligerait l’Union européenne à faire un pas en arrière dans sa lutte contre le réchauffement climatique; ensuite, le risque de renoncer à un système de quotas pour un système de compensation carbone, qui serait beaucoup moins efficace pour contenir l’augmentation des émissions carbone et qui avantagerait les compagnies aériennes.

Ces négociations sont donc très mal engagées, d’autant plus que la Commission européenne a déjà avoué qu’elle était prête à rendre le mécanisme de quotas carbone obligatoire seulement à partir de 2027… Donc l’urgence climatique ne semble pas avoir atteint ni les bureaux de Bruxelles ni ceux de Montréal et ces négociations laissent l’ensemble des observateurs très perplexes sur les accords qui pourraient en sortir.

Nous appelons donc à un sursaut des négociateurs car 3% : ce n’est pas rien. Si l’aérien était un pays, il serait le 7ème pays le plus émetteur au monde, c’est-à-dire l’équivalent de l’Allemagne. C’est comme si on avait fait la COP21 sans l’Allemagne, c’est hallucinant. »

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