La France doit désigner ses deux eurodéputés fantômes

5 novembre 2009
5.11.2009

L’entrée en vigueur du traité de Lisbonne prévoit que la délégation française passe de 72 à 74 députés européen. Le gouvernement français tarde à régulariser la situation.

Qui seront les deux députés européens supplémentaires dont bénéficiera la France dès l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne? Officiellement, aucune décision n’a été prise pour le moment. Et en coulisses, personne ne sait. Ou ne veut savoir. L’un des effets du traité de Lisbonne sera de faire croître ses eurodéputés de 736 à 751. Comme onze autres pays, la France voit ainsi augmenter le nombre de ses représentants, et devrait compter 74 parlementaires au lieu de 72 .

Mais en France comme à Bruxelles, les différents protagonistes se renvoient la balle. «Je suis dans le brouillard le plus total», dit l’un. «Je ne sais rien», enchaîne un autre. Pourtant, le temps presse. Car maintenant que le président tchèque a levé le dernier obstacle à la mise en œuvre du traité de Lisbonne, le texte entrera en vigueur le 1er décembre. Or en théorie, dès son entrée en vigueur, les institutions sont censées intégrer immédiatement les nouvelles règles du jeu communautaire.

«L’urgence est relative», réplique-t-on au PPE. L’argumentation du groupe de centre-droit s’appuie sur le fait que le nombre de sièges résulte en fait d’un accord du Conseil européen, dégagé en décembre 2008, et non directement du traité de Lisbonne. Le traité fixe en effet que le nombre d’europarlementaires ne doit pas dépasser 750 plus le président, et que les délégations nationales doivent être comporter un minimum de 6 députés et un maximum de 96 députés par État membre.

Vide juridique

Or, ces conditions ne seront pas respectées par la modification prévue, puisque le nombre total des députés européens passera à 754 et que l’Allemagne aura plus de 96 sièges. «Il faudra donc adopter un acte ayant valeur de modification des traités», souligne le président de la commission des Affaires européennes du Sénat, Hubert Haenel, dans un rapport publié en janvier 2009. Et cette modification pourrait bien être jointe au traité d’adhésion de la Croatie. C’est à dire vraisemblablement pas avant courant 2011. «Ils ne sont pas pressés de régler la question. On a un problème», se désole une source interne au Parlement européen. «L’arbitrage se fera au plus haut sommet de l’Etat», lâche un proche d’un parlementaire européen français.

Reçus à Matignon le 2 novembre, les députés européens UMP ont soulevé le problème. Ils se sont vus répondre que la France faisait face, dans ce domaine, à un vide juridique. «On aurait du faire un décret pour régler la question plus tôt», a-t-on rétorqué aux parlementaires.

Cette solution avait d’ailleurs été préconisée par Hubert Haenel dans son rapport. «Il semble que le décret qui répartira les sièges entre les circonscriptions (…) devra prévoir l’hypothèse où deux sièges supplémentaires seraient attribués à la France, de manière à ce que l’attribution de ces sièges à telle ou telle circonscription s’effectue sur des bases indiscutables.» Mais dans le décret publié deux mois plus tard au journal officiel, rien de tel. Raté, donc, pour les «bases indiscutables».

La solution la plus probable consisterait à accorder un député européen supplémentaire aux régions les plus défavorisées dans le rapport élus/population. Le Nord-Ouest et l’Est disposeraient chacune d’un député en plus. La Française Sandrine Bélier revendique deux députés Europe écologie supplémentaires: François Dufour (Nors-Ouest) et Jacques Muller (Est), actuellement sénateur.

Un temps évoquée, l’organisation d’une élection partielle auprès des Français de l’étranger pour élire les deux nouveaux parlementaires a finalement été écartée par l’Elysée.

« Situation absurde »

«Cette arlésienne n’a que trop duré!», fulmine la chef de la délégation française du groupe Verts-ALE au Parlement européen, Hélène Flautre. «On en arrive à une situation absurde, pour ne pas dire ridicule», poursuit-elle. L’eurodéputée, qui affirme avoir parlé du problème au secrétaire d’Etat aux Affaires européennes, Pierre Lellouche, appelle à un règlement rapide de la question. «M. Lellouche me répond que la situation est complexe et qu’il est en train d’examiner la question», explique l’eurodéputée.

Quand l’Elysée aura rendu son arbitrage, le gouvernement devra encore présenter une loi ou un décret en Conseil des ministres pour fixer les nouvelles règles du jeu. Mais la France pourrait toujours invoquer le cas allemand pour retarder sa décision. Contraint par le traité de Lisbonne de renoncer à trois sièges au Parlement européen, Berlin a en effet obtenu de conserver ses trois députés supplémentaires jusqu’à la fin de la mandature.

UNE PROCHE DE SARKOZY POUR REMPLACER BARNIER

Le départ de Michel Barnier pour la Commission européenne dans les semaines à venir fera une heureuse: Constance Le Grip, sixième sur la liste francilienne de l’UMP aux élections européennes. En cas de démission du Parlement européen, la loi prévoit en effet que le premier non-élu de sa liste bénéficie automatiquement de son siège.

A 48 ans, Constance Le Grip a notamment été conseillère de Nicolas Sarkozy lorsqu’il était ministre de l’Intérieur, avant d’être l’une des coordinatrice de la campagne présidentielle. De 1986 à 1995, elle fut l’assistante parlementaire d’Alain Lamassoure. Elle est aujourd’hui conseillère technique au cabinet du président de la République.

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