Les pratiques fiscales de Nestlé: claires comme de l’eau de roche ?

À l’occasion de la journée mondiale de la santé, nous avons adressé un courrier à Nestlé pour obtenir que la société suisse améliore sa politique fiscale et saisisse l’opportunité d’être pionnière en matière de responsabilité sociale d’entreprise.
 
Vous connaissez peut-être le slogan de ce géant mondial de l’industrie agroalimentaire. « Bien manger, Bien vivre ». Mais vous ne savez peut-être pas que Nestlé est également un acteur clé à l’échelle mondiale du secteur de l’eau en bouteille. Et l’accès à l’eau potable, en Europe et au-delà, est une priorité pour nous, écologistes européens. Nous sommes convaincus que l’accès à une eau de qualité est un droit humain fondamental.

Plus de 600 millions de personnes dans le monde n’ont toujours pas accès à de l’eau potable, selon l’ONU. Pourtant, il existe encore des entreprises déjà fort rentables qui font des profits en mettant en bouteille des ressources en eau et en les vendant. Ce modèle économique, c’est la privatisation d’une ressource naturelle et vitale. Sur le marché mondial de l’eau en bouteille, Nestlé représente 11 à 13%, soit le plus gros morceau du gâteau. En Europe, Nestlé dépasse largement le Groupe Danone et Coca Cola.

Nous sommes profondément préoccupés par le rôle que jouent les grandes multinationales dans la multiplication à l’échelle mondiale de politiques de privatisation des ressources en eau. Sur cette question essentielle, 2 millions de citoyens européens ont signé la toute première initiative citoyenne européenne « Right2Water » (droit à l’eau), qui dénonçait la privatisation de l’eau.

Alors pourquoi écrire à Nestlé à l’occasion de la Journée mondiale de la santé?

L’accès universel à la santé signifie l’accès à des ressources naturelles propres pour tous. Cela dépend aussi de l’accès universel à des systèmes de soins de santé solides, basés sur la solidarité et la répartition équitable de la richesse. Et cela nécessite une véritable justice fiscale, une de nos priorités politiques. Nous avons déjà par le passé révélé les astuces comptables utilisées par les géants industriels – IKEA, BASF, Zara (Inditex) – pour réduire leurs contributions fiscales, au détriment des citoyens et des PME qui sont, eux, contraints de payer et compenser ces pertes fiscales.

Et qu’en est-il de la politique fiscale de Nestlé ? En 2014, le PDG de Nespresso (une marque appartenant à Nestlé), Jean-Marc Duvoisin, déclarait dans une interview : « Nous devons payer les impôts partout où il faut les payer ». On ne peut pas être plus d’accord que ça ! Mais nos premières recherches semblent indiquer que Nestlé ne paierait pas ses impôts « partout où il faudrait les payer ». L’entreprise recourrait en réalité à des transferts de profits de grande échelle et à l’évitement fiscal.

Nous avons collecté des preuves de différents types de transactions internes au groupe (paiement de royalties et intérêts) susceptibles d’être utilisées à des fins de réduction de la base imposable de certaines entités. Nous avons également identifié des structures typiques de stratégies d’évitement fiscal, telles que des entreprises de holding et des opérations financières internes qui passent par les Pays-Bas, le Luxembourg et la Belgique. Par exemple, entre 2009 et 2014, une filiale financière interne en Belgique n’a presque pas payé d’impôts sur un revenu de 660 millions d’euros, provenant principalement d’intérêts sur des prêts internes au groupe.

Puisque Nestlé a fêté ses 150 ans la semaine dernière, nous lui avons adressé une requête solennelle (courrier) : avec autant de décennies d’expérience, Nestlé serait-il prêt à s’engager à soutenir et mettre en oeuvre la publication d’informations fiscales pays par pays ?

En améliorant la transparence de sa politique fiscale, Nestlé saisirait l’opportunité d’être pionnier en matière de responsabilité sociale d’entreprise. Ce serait un beau cadeau pour tous ses consommateurs à l’occasion de son 151ème anniversaire !

Photo : Levi Xu

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Un commentaire

  • claire dit:
     - 

    Comme indiqué, l’accès au plus grand nombre à l’eau potable doit être indéfectible et cette multinationale qui ne cesse d’engendrer des profits doit prendre conscience de la responsabilité qui lui incombe, l’optimisation fiscale de la part de ce groupe qui fait du profit sur les ressources naturelles est aberrent et ils devraient faire part de la plus grande transparence.

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