La copie baclée de la Commission européenne dans l’encadrement des perturbateurs endocriniens

La Commission européenne avait l’obligation légale de publier des critères de définition juridique des perturbateurs endocriniens avant décembre 2013. Il aura fallu une condamnation inédite de la Cour européenne de justice [1] et la pression des écologistes pour qu’elle présente enfin, ce mercredi 15 juin 2016, sa proposition. Une proposition bien en deçà de l’enjeu sanitaire que représentent ces substances qui dérèglent notre système hormonal.
Réaction de Michèle RIVASI, députée écologiste au Parlement européen :

« La Commission européenne a lamentablement bâclé sa copie. En 2013, les services de la DG environnement de la Commission avaient déjà préparé un avant-projet pour encadrer les perturbateurs endocriniens. Avant-projet qui a été mis au placard mais qui établissait clairement que « la définition du terme « perturbateur endocrinien » et des critères pour les identifier devraient être fondés sur les connaissances scientifiques.

Or, la présentation des critères réalisée aujourd’hui s’éloigne de manière honteuse des connaissances scientifiques actuelles. La Commission propose de mettre en place des dérogations au principe de l’évaluation d’une substance sur la base du danger. Ces dérogations permettrait d’évaluer une substance en fonction de « l’exposition » et du « risque » ce qui va totalement à l’encontre de la législation européenne qui défend l’idée de l’évaluation des substances selon le danger intrinsèque qu’elle représente et non pas le risque supposé qu’elle pourrait causer. Les notions de « risque » et d’ »exposition » sont des absurdités. Une exposition de même dose au Bisphénol A, par exemple, n’aura pas le même effet sur un bébé que sur une personne adulte. Une dose intermédiaire peut même parfois avoir moins d’effet qu’une dose faible.

De plus, selon la proposition de la Commission, seuls les effets sur les humains feraient preuve. Ce qui reviendrait à exclure la plupart des perturbateurs endocriniens de la législation et n’a rien à voir avec la définition de l’OMS comme le prétend le Commissaire Andriukaitis. Nous sommes donc les nouveaux cobayes à venir de l’industrie chimique qui doit se réjouir d’une telle proposition si restrictive et bornée. Une proposition que nous refusons en bloc et à laquelle les écologistes s’opposeront fermement au Parlement européen. Dans la hiérarchie des normes qui fondent notre engagement politique, notre santé et notre environnement passent avant les profits de quelques marchands de plastiques et de pesticides. »

Pour José BOVE, eurodéputé écologiste membre de la Commission agriculture :

« De nombreux pesticides chimiques utilisés en agriculture sont suspectés d’être des perturbateurs endocriniens. C’est le cas du glyphosate dont l’autorisation risque d’être renouvelée par la Commission européenne, en toute négation du principe de précaution.

Il suffit d’une toute petite dose de perturbateurs endocriniens pour qu’ils empoisonnent ceux et celles qui y sont exposés. Les effets potentiels sur la santé sont terribles : infertilité, cancer de la prostate, obésité, diabète, maladies neurodégénératives… des maladies bien connues des agriculteurs, premières victimes de ces pesticides. C’est au moment de la préparation de la bouillie d’épandage et de l’épandage en lui-même qu’ils risquent le plus gros de leur santé.

Les perturbateurs endocriniens font partie de ce cocktail quotidien que l’industrie chimique impose dans l’alimentation, l’agriculture, les plastiques, les cosmétiques… Il est temps de protéger la santé des générations présentes et futures en interdisant ces poisons! »

[1] Jugement du 16 décembre 2015, affaire T-521/14, Suède c. Commission européenne.

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Un commentaire

  • C Sergeant dit:
     - 

    En réaction à ce communiqué, je reporte ici un extrait des propos de Barbara Demeneix spécialiste des hormones thyroïdiennes, directrice du département régulations, développement et diversité moléculaire du Muséum national d’histoire naturelle de Paris :
     » Des scientifiques ont démontré que les perturbateurs endocriniens affectent la fécondité, altèrent le développement foetal, augmentent les risques de cancer, de diabète ou d’obésité. Depuis la dernière décennies, de nouveaux signaux sont apparus : les augmentations de l’hypothyroïdie, du trouble du déficit de l’attention/hyperactivité, ainsi que des troubles du spectre autistique. ( un enfant autiste sur 68 en 2014 aux USA
    , un garçon sur 42 ! )
    Aux USA le Toxic Substances Control Act a répertorié 84 000 molécules de synthèse dans l’environnement. Cet inventaire ne comprend pas les pesticides; les additifs alimentaires et les cosmétiques. Les perturbateurs endocriniens endommagent aussi notre cerveau et réduisent notre QI. » C’est ce que cette chercheuse explique dans  » Le cerveau endommagé. Comment la pollution altère notre intelligence et notre santé « .

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