Santé au travail : La Commission européenne rappelée à l’ordre

Les cancers liés à l’activité professionnelle font au moins 100 000 victimes chaque année dans l’Union européenne. Un scandale sanitaire qui pourrait être en partie réglé si en s’attaquant au problème on prenait enfin en compte les intérêts des salariés et non plus ceux des seuls industriels.
 
Selon la Commission européenne, 53% des accidents de travails sont des cancers. Malgré les chiffres accablants et en dépit des alertes du monde médical et scientifique. Consciente de l’urgence d’agir elle a donc proposé de compléter la législation existante en soumettant en mai 2016 au Parlement européen et aux États membres de l’Union européenne une proposition de révision de la directive « Agents cancérigènes ou mutagènes au travail ».

Cette question est depuis longtemps dans le radar des élus écologistes européens qui regrettaient par la voix de Karima DELLI en janvier 2017 que la Commission décide d’encadrer seulement un petit nombre de substances toxiques en excluant entre autres le diesel pourtant reconnu cancérogène par l’OMS depuis 2012 et dont les vapeurs touchent plus de 3 millions de travailleurs.

Pour préparer ce texte – un travail à la fois technique et politique, la Commission européenne s’est appuyée sur un comité d’experts : le Scoel (Comité scientifique en matière de limites d’exposition professionnelle). Hors, le 24 février, le journal Le Monde révélait que 15 des 22 experts du comité fixant les limites d’exposition professionnelle (Scoel), travaillaient également pour l’industrie, notamment Shell, dont on imagine la lutte acharnée pour écarter le diesel du champ de la directive. « En refusant de légiférer sur les conditions de travail pour réduire, voire éliminer, les risques auxquels sont exposés les travailleurs, la Commission est complice des employeurs qui mettent en danger la vie de leur personnel » estime Michèle RIVASI porte-parole santé du groupe écologiste qui appelle à soutenir une pétition initiée par une sociologue spécialisée dans la santé au travail demandant le renvoi de ces experts et la mise en place d’une expertise réellement indépendante sur les risques toxiques dans le travail.

Appelée à se prononcer sur le texte de la Commission ce 28 février 2017, la commission parlementaire Emploi et Affaires sociales du Parlement européen l’a amendé. Les Verts européens ont obtenu l’appui d’une large majorité pour élargir le champ d’application de ce texte aux substances reprotoxiques. Karima DELLI membre de la Commission affaires sociales estime que : « C’est une victoire pour les Verts qui bataillent pour la reconnaissance pleine et entière des dangers présentés par ces substances pour le système reproductif des travailleuses qui y sont exposées ». Le Parlement se prononce également pour l’amélioration des valeurs limites d’exposition pour plusieurs autres substances comme les poussières de bois, la silice cristalline ou le chromium VI. « Il est crucial que le législateur élargisse enfin la liste des substances réglementées et établisse des valeurs-limites à la hauteur des enjeux sanitaires » concluent les élus écologistes.

Alors que les discussions institutionnelles sur la révision de cette directive vont se poursuivre dans les prochains mois, les écologistes européennes demandent que toutes les substances dangereuses soient prises en compte, à commencer par le diesel car 31 millions de tonnes de substances cancérogènes, mutagènes ou reprotoxiques sont produites annuellement en Europe et 20 millions de personnes y sont exposées.

Photo : Pete Wright

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