Intervention de Yannick Jadot suite à la présentation par Emmanuel Macron des priorités de la PFUE
Quel beau discours ! Quel beau projet pour l’Europe ! Tout y est : le climat, la biodiversité, la souveraineté économique, les valeurs !
Sauf que… vous présidez la France depuis 5 ans, et qu’à ce titre vous êtes comptable d’un bilan, au niveau français comme au niveau européen.
Nous le savons : le réchauffement climatique est le plus grand défi auquel l’humanité est aujourd’hui confrontée. Méga feux, canicules, inondations, sécheresses… percutent déjà nos conditions d’existence.
Mais lutter pour le climat n’est pas seulement un impératif de survie.
Ce peut être, si l’Europe le décide enfin, une extraordinaire opportunité pour redonner du sens à notre économie, pour innover, créer des emplois de qualité, aménager durablement nos territoires, reconstruire une société juste, solidaire, bienveillante, démocratique.
C’est la voie que nous écologistes avons choisie.
Vous en suivez une autre, celle d’une alliance climaticide avec la Pologne et la Hongrie : promouvoir le gaz pour sauver le nucléaire de sa faillite inéluctable. Quitte à sacrifier l’ambition climatique européenne.
Vous resterez dans l’histoire, monsieur le Président, comme le président de l’inaction climatique.
Parce qu’au fond, vous êtes un climato-arrangeant. Vous préférez signer des armistices avec les lobbys plutôt que de mener la guerre contre le réchauffement climatique.
Vous préférez procrastiner, renoncer, fantasmer des solutions technologiques dans 10, 15 ou 20 ans, alors qu’il nous faut, dès aujourd’hui, décréter la mobilisation générale.
Nous le devons à notre jeunesse !
Cette jeunesse nous montre d’ailleurs la voie et l’exemple, terrifiée par la catastrophe écologique, mais pourtant si forte de son énergie, de sa créativité, de sa diversité, de ses engagements pour le climat et la justice sociale.
Vous avez justement rappelé que la paix, les droits humains, la démocratie sont notre patrimoine commun.
Alors pourquoi, il y a un an, vous célébriez la conclusion d’un accord d’investissement avec la Chine, condamnant un peu plus nos entreprises à son appétit prédateur ? Alors pourquoi vous célébriez la bonne affaire quand le parti communiste chinois réprimait dans le sang les combattants de la démocratie à Hong Kong et perpétrait un génocide sur les Ouighours !
Monsieur le Président, il y a 6 ans, au nom des valeurs de l’Europe, vous rendiez hommage au courage d’Angela Merkel dans l’accueil des réfugiés syriens.
Le 24 novembre dernier 27 migrants se noyaient dans la Manche, s’ajoutant aux milliers de morts qui sombrent à nos frontières. Parmi les victimes, Maryam, une jeune femme de 24 ans, kurde irakienne. Elle tentait de rejoindre son fiancé en Angleterre. Elle n’était animée que par la soif de vivre et d’aimer.
Alors pourquoi, au nom de quelle sécurité, de quelle prétendue identité décidez-vous, chaque jour, à Calais, d’humilier ces survivants, d’arracher leur tente, d’organiser leur désespoir ?
Monsieur le Président, cessez de tendre l’oreille aux théories fumeuses et nauséabondes du grand remplacement ! Occupez-vous plutôt de la réalité scientifique du grand réchauffement !
En vérité Monsieur le président, nous avons une divergence de fond sur l’Europe que nous voulons. Notre Europe ne sera jamais la vôtre, celle du renoncement climatique, celle du glyphosate, celle de la circulation sans entrave des biens, des services et de la finance, celle des murs, des barbelés, des miradors et des humiliations pour les femmes, les hommes et les enfants.
Notre Europe ne sera jamais celle qui cède sur le droit à l’avortement, comme vous venez de le faire, avec vos libéraux, les socialistes, les conservateurs et l’extrême-droite !
Notre Europe, Monsieur le Président sera toujours celle de la responsabilité, de l’avenir, de la jeunesse, de l’innovation, celle de la vie, de la dignité, de la justice et des libertés.
Je fais le vœu, Monsieur le Président, que c’est cette Europe-là qui inspirera votre Présidence de l’Union.
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