Jeudi noir pour la politique climatique de l’UE
« Je constate que les députés européens de droite et de plus en plus de gauche peinent à résister à la pression et aux chantages des grands lobbies industriels. Plutôt que d’assumer leur responsabilité face au formidable défi du dérèglement climatique, plutôt qu’engager l’économie européenne vers l’innovation, la sobriété énergétique et les renouvelables, ils se posent en défenseurs d’une économie en faillite. C’est finalement la stratégie du moins-disant social et environnemental d’ArcelorMittal qui a gagné ce matin : des centaines de millions d’euros de bénéfices engrangées sur le dos des contribuables, sans aucun effort à consentir en termes de réduction des émissions et d’innovation. Que la majorité de la commission énergie soit victime de myopie aggravée est très inquiétant. Il faut souhaiter que la commission environnement et le Parlement européen lors de leurs votes aient beaucoup plus de lucidité et de sens des responsabilités.
Alors qu’il est nécessaire d’allonger la prévisibilité de la politique énergétique et climatique européenne en définissant des objectifs contraignants pour 2030 et en renforçant la crédibilité des instruments économiques qui ont été mis en place dans le cadre du paquet « énergie-climat » en 2008, une majorité des députés a renoncé à toute ambition dans ce domaine. Face à la crise ce sont les opinions les plus conservatrices qui l’ont emporté et le vote de ce matin témoigne du caractère rétrograde et dépassé d’une partie des sociaux-démocrates européens, incapables de penser le monde de l’après-pétrole.
L’efficacité de la politique climatique européenne est aujourd’hui menacée et le fonctionnement du système européen d’échange de quotas d’émissions se trouve déséquilibré par des circonstances exceptionnelles. Le rejet de la proposition de la Commission européenne d’intervenir sur le calendrier des enchères des quotas de CO2 afin d’en améliorer l’efficacité par le gel de 900 millions de quotas excédentaires met en péril l’un des principaux outils de la politique climatique européenne. Cela marque le refus d’orienter l’économie européenne vers une plus grande sobriété énergétique, le renoncement à l’indépendance énergétique, l’impossibilité de répondre aux grands enjeux industriels structurels de long terme et l’oubli des engagements européens pour l’aide à l’adaptation au changement climatique.
Au delà de l’enjeu climatique, la réduction des émissions de CO2 doit être un levier puissant de la transformation de l’économie européenne, du développement d’innovations sobres en carbone et de solidarité internationale. »