Sommet européen : avec les gaz de schiste, les dirigeants européens veulent-ils engager la contre-révolution énergétique ?
« Que les chefs d’Etat et de gouvernement s’inquiètent des conséquences, sur l’économie européenne et les ménages, de la montée inéluctable des prix de l’énergie est une bonne nouvelle. Qu’ils y répondent notamment par les gaz de schiste est illusoire. Aux États-Unis, le mythe de la révolution du gaz de schiste est déjà en train de se déliter : coûts d’exploitation supérieurs au prix de vente du gaz, érosion de la rentabilité, sans parler de la faiblesse des règlementations environnementales et sanitaires. En Europe, même l’Eldorado polonais ne fait plus rêver. Total et GDF Suez ont déjà renoncé faute de rentabilité.
Il est grand temps que les chefs d’États européens mettent plus d’ambition sur l’efficacité énergétique et soutiennent une plus grande coopération européenne dans le domaine de l’énergie. Ce serait une stratégie plus efficace pour réduire les factures de l’énergie que de rêver d’une expansion des gaz de schiste à l’américaine. Or, sous la pression de quelques lobbies énergétiques et industriels, les dirigeants européens pourraient enclencher une contre-révolution énergétique, se détournant des priorités définies par l’UE en matière d’économies d’énergie, d’énergies renouvelables et d’investissements dans les infrastructures énergétiques.
Le Conseil européen doit au contraire renforcer le paquet climat énergie de 2009 en fixant des objectifs pour 2030 et miser sur des mesures d’efficacité énergétique et les énergies renouvelables pour assurer notre indépendance énergétique plutôt que sur les gaz de schiste.
La clé de la compétitivité industrielle européenne ne réside pas dans les forages gaziers destructeurs pour l’environnement .Au contraire, il faut industrialiser nos politiques de l’énergie en donnant les moyens à l’industrie européenne d’anticiper le tournant énergétique et d’investir dans les technologies d’avenir. Dans le même temps, il ne faut pas hésiter à protéger des secteurs comme le photovoltaïque des pratiques commerciales déloyales. Alors que les États-Unis ont imposé en quelques semaines des droits de douane jusqu’à 250 % sur les panneaux chinois, l’UE, sous la pression de l’Allemagne, hésite encore à appliquer des sanctions pour contrer le dumping chinois. Une lenteur et un immobilisme sidérants au regard des milliers d’emplois, des compétences et des outils industriels performants qui sont actuellement sacrifiés ! »
Et Yannick Jadot d’ajouter :
« La France, comme les autres pays de l’UE, doit prendre ses responsabilités pour accélérer dès maintenant la transition énergétique . Le Président de la République et le gouvernement français doivent tenir une ligne beaucoup plus cohérente entre la politique nationale et la politique européenne dans ce domaine. On ne peut pas d’un côté défendre l’ambition d’une communauté européenne de l’énergie fondée sur des partenariats industriels puissants dans les renouvelables et, de l’autre, défendre des choix nationaux d’investissements sur les énergies fossiles. »