Interdiction des produits issus du travail forcé
Le jeudi 9 juin, le Parlement européen a adopté deux résolutions déterminantes pour le respect des droits humains dans la politique commerciale de l’Union européenne.
La première réclame l’instauration d’un nouvel instrument commercial permettant d’interdire l’importation au sein du marché européen de tout produit issu du travail forcé.
Pour le groupe Verts/ALE, qui défend, de longue date, une politique commerciale respectueuse des droits humains et des critères de développement durable, un instrument commercial permettant de bloquer les marchandises fabriquées ou transportées dans le cadre d’un travail forcé est nécessaire pour compléter la future directive sur la diligence raisonnable des entreprises (1). Les Verts/ALE se réjouissent du signal fort envoyé par le Parlement à la Commission afin que l’UE se dote d’un instrument similaire à celui déjà en oeuvre aux États-Unis et au Canada. La Commission devrait présenter une proposition législative promise par sa présidente en 2021 après l’été.
La seconde résolution porte sur les des droits de l’homme dans le Xinjiang et les dossiers de police du Xinjiang.
Le Parlement y dénonce les crimes contre l’humanité et risques sérieux de génocide perpétrés par le régime totalitaire chinois à l’encontre des Ouïghours et autres minorités musulmanes. Il réclame, à nouveau, mise en place d’un instrument commercial interdisant l’importation de marchandises issues du travail forcé et complétant la législation sur la diligence raisonnable. Enfin, il préconise le renforcement des sanctions contre les dirigeants chinois actuellement visés par l’Union européenne (2) ainsi que leur extension à tous les individus ou entités identifiés dans les dossiers de police du Xinjiang.
Déclaration de Yannick Jadot, membre de la commission du Commerce international :
« Les Européennes et les Européens ne veulent plus cautionner l’esclavage moderne que constitue le travail forcé, composante essentielle en Chine des persécutions perpétrées contre les Ouïghours. Ils exigent une politique commerciale conforme aux valeurs de l’Union, à la dignité humaine et aux droits sociaux.
Sous la pression du Parlement, le Conseil et la Commission ont dû remiser leur soutien à l’accord d’investissement avec la Chine. Et, aujourd’hui, le Parlement européen signifie qu’il ne veut plus que l’Union européenne soit complice du régime totalitaire chinois. Un régime qui perpétue, depuis 5 ans, un crime contre l’humanité dans la province du Xinjiang.
L’Union européenne est le deuxième marché au monde pour les exportations chinoises. En interdisant l’importation des produits issus du travail forcé, nous agirons enfin contre l’exploitation et protégerons les travailleuses et les travailleurs en Chine et en Europe. Nous sommes plus que jamais déterminé·e·s à imposer le droit et le respect de la dignité humaine à ces entreprises et multinationales engrangeant leurs profits au détriments des êtres humains. La fin de l’ère de l’irresponsabilité de notre politique commerciale a sonné.«
Déclaration de Saskia Bricmont, membre de la commission du Commerce international :
« 25 millions. C’est l’estimation du nombre de personnes contraintes au travail forcé dans le monde, y compris dans des pays avec lesquels l’Union européenne négocie des accords de libre-échange.
Ce chiffre est d’autant plus glaçant que 6 à 10 millions d’enfants sont victimes de cette situation et que les Nations unies s’attendent à une détérioration du fait de la pandémie et de la guerre en Ukraine qui enfoncent davantage de familles dans la pauvreté.
Les produits issus de ce nouvel esclavage atterrissent sur le marché européen alors que les États-Unis ou le Canada ont su agir pour empêcher toute connivence à l’égard de ces violations des droits humains.
La Commission européenne ne peut davantage céder au chantage des tenants d‘un libéralisme économique forcené. Sans régulation, c’est systématiquement la loi du plus fort et les intérêts d’une minorité qui prennent le dessus. Ce tableau, nous le connaissons. C’est celui de drames humains et environnementaux et, avec eux, la légitimité des pouvoirs publics qui finit par sombrer.«
(1) Pour rappel, la future directive sur la diligence raisonnable concerne un nombre limité d’entreprises et pourrait, par ailleurs, s’avérer insuffisante dans des contextes de travail forcé systématique organisé par un État comme c’est le cas, notamment, en Chine avec les Ouïghours.
Cet instrument commercial est basé sur les produits, donc la taille (et le profil sectoriel) de l’entreprise n’est pas pertinente.
Le groupe des Verts/ALE a obtenu que le nouvel instrument commercial permette notamment :
la rétention des marchandises à la frontière de l’UE par les autorités publiques lorsqu’elles considèrent qu’il existe des preuves suffisantes que ces marchandises ont été fabriquées ou transportées dans le cadre du travail forcé. La charge de la preuve incombe donc à l’importateur qui devra démontrer le contraire afin d’obtenir la mainlevée des marchandises.
la saisie des produits en cas de constatation de travail forcé.
la réparation, par les entreprises responsables, pour les travailleurs victimes.
(2) Chen Quanguo, Zhao Kezhi, Guo Shengkun, Hu Lianhe
Intervention de Yannick Jadot
Intervention de Saskia Bricmont (députée écologiste belge)
Consultez la Campagne du groupe des Verts/ALE contre le travail forcé
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