Lois « Industrie à zéro émission nette » – « Matières premières critiques »

La Commission européenne a présenté le 16 mars un règlement sur l’industrie à zéro émission nette. Venant renforcer le plan industriel du Pacte vert, cette réglementation sera complétée par une seconde sur les matières premières critiques.

La proposition législative relative à l’industrie « zéro émission » est censée répondre, notamment, à la loi américaine sur la réduction de l’inflation (IRA), en accélérant la transition de l’Union européenne vers une industrie à zéro émission nette. Elle doit non seulement assurer la décarbonation mais également la résilience du système énergétique et la sécurité d’approvisionnement pour les technologies « zéro émission » pour lesquelles l’Union européenne est à ce jour un importateur net (principalement en provenance de la Chine).

Le groupe Verts-ALE accueille favorablement cette initiative visant à garantir une autonomie industrielle de l’Union européenne et plaçant le respect de nos engagements climatiques au cœur de la compétitivité de l’Union européenne. Cette politique industrielle axée sur la neutralité climatique permettra également de créer massivement des emplois verts dans l’ensemble de l’Union.

Néanmoins, certains aspects de la proposition demeurent problématiques aux yeux du groupe Verts-ALE. En particulier, l’inclusion possible du nucléaire dans la liste des technologies considérées comme étant à « zéro émission » et en mesure de contribuer significativement à nos engagements climatiques à l’horizon 2030. Ou encore les éléments ayant trait au stockage de CO2 qui donnent le sentiment que cette technologie peu mature pourrait être privilégiée par les industries au détriment d’alternatives permettant de ne pas émettre de CO2.

Déclaration de Damien Carême, membre de la commission de l’Industrie, rapporteur pour le groupe Verts/ALE sur le règlement sur l’industrie à zéro émission nette :

« La crise sanitaire nous a montré de manière dramatique la désindustrialisation de l’Union européenne et l’extrême dépendance qui en résultait. Un constat que le conflit en Ukraine n’a fait que renforcer. Cette première proposition législative au niveau de l’Union européenne consacrée à la politique industrielle est donc bienvenue.
En tant qu’écologiste, je me félicite que l’Union européenne ait enfin réalisé que la transition vers une économie nette zéro peut, à la fois, sauver le climat et renforcer la souveraineté de l’Union européenne tout en créant de nombreux emplois verts. La reconnaissance des énergies solaire, éolienne et géothermique comme étant zéro émission nette tout comme l’inclusion de critères de contribution à la durabilité et à la résilience dans les procédures de marchés publics et d’appels d’offres figurent parmi les propositions prometteuses de la Commission.
Nous serons, par contre, particulièrement vigilant·e·s sur plusieurs points : tout d’abord, sur les conséquences néfastes sur l’environnement, la biodiversité et les emplois que pourrait entraîner la qualification de « supérieurs à l’intérêt public » des projets stratégiques, les dégageant ainsi d’un certain nombres de contraintes légales ; ensuite, sur l’inclusion éventuelle de la séquestration carbone et du nucléaire dans la liste des technologies zéro émission nette ; et, enfin, l’objectif de séquestration de 50 millions de tonnes de CO2 par an.
Cette législation ne doit, en effet, être l’occasion ni de relancer l’industrie nucléaire sous le prétexte fallacieux de nouvelles technologies ni pour certaines industries de faire l’impasse sur la réduction de leurs émissions de CO2 au profit de leur stockage, encore moins pour les industries pétrolières et gazières de réaliser de nouveaux profits en assurant seules la gestion des puits de carbone. »

Concernant la proposition législative sur les matières premières critiques, la vice-présidente du groupe Verts-ALE, membre des commission de l’Industrie et de l’Environnement, Marie Toussaint, a déclaré :

« La transition énergétique, la sortie des énergies fossiles, requiert l’accès à des matériaux critiques. Il nous faut garantir que l’Union européenne puisse y avoir accès, mais aussi que l’extraction de ces matières en quantité finie se fasse dans le respect des limites planétaires, des droits des peuples et avec un haut niveau d’exigence sociale et environnementale.
La proposition de loi de la Commission européenne comprend des pistes intéressantes pour une politique européenne active et diversifiée sur les matières premières. Elle met en avant l’exploitation minière durable, la transformation, le recyclage ainsi que l’économie circulaire et rend l’Union européenne moins dépendante des autocrates et des dictateurs.
Le hic tient dans le fait que la proposition ne tienne absolument pas compte de la finitude de la planète ni du potentiel des actions axées sur la baisse de la demande, quand bien même tous les objectifs généraux proposés (extraction, transformation, recyclage) seraient plus facilement atteints en réduisant l’empreinte matérielle.
De plus, l’accélération et la simplification des évaluations environnementales et de la consultation du public ne doivent en aucun cas se faire en contradiction avec les normes environnementales et sociales les plus élevées.
L’Union doit mettre en place une Autorité aux limites planétaires, sur le modèle du conseil pour le climat, de sorte à ne pas laisser la course à la rentabilité guider l’extraction minière ; et garantir l’accès et la participation des citoyen·ne·s aux décisions et à la justice, en particulier les communautés locales et les défenseurs environnementaux les plus impactés par la course vers les matières premières. Un appel aveugle à davantage d’exploitation minière n’a pas sa place.
Enfin, il est essentiel que l’Union mette en place des garde-fous pour que les populations déjà fortement exposées aux pollutions ne subissent pas à nouveau les dommages d’une politique productiviste et extractiviste.
ll est important de rappeler, aussi, que les minéraux ne doivent en aucun cas être recherchés dans les fonds marins des eaux internationales comme des eaux territoriales des États membres.« 

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