Plan pour des logementsabordables : un discours fort, des actes insuffisants

16 décembre 2025

La Commission européenne a présenté aujourd’hui le tout premier Plan européen pour des logements abordables. Cette initiative marque une reconnaissance politique importante de l’ampleur de la crise du logement en Europe et du fait que le logement ne peut plus être considéré comme une simple marchandise, mais comme un droit fondamental et un pilier de la dignité humaine.

Si le narratif du Plan va dans le bon sens, notamment en liant logement, durabilité, qualité de vie et justice sociale, les mesures concrètement proposées restent largement insuffisantes et, sur certains points, profondément préoccupantes. À ce stade, le Plan ne répond ni à l’urgence sociale ni aux causes structurelles de la crise du logement.

Pour Marie Toussaint, vice-présidente du groupe Verts/ALE :

« Dire que le logement est un droit fondamental ne suffit pas. Sans cadre réglementaire protecteur ni moyens publics à la hauteur, ce droit reste lettre morte. Aujourd’hui, l’écart entre le discours de la Commission et ses propositions concrètes est trop important pour répondre à la violence de la crise du logement.
Au-delà d’une plateforme d’investissement certes prometteuse, le plan s’appuie largement sur des recommandations, des outils volontaires et des plateformes de coordination, là où la situation exigerait des décisions politiques claires et des règles renforcées. La Commission ne fixe pas d’objectifs clairs sur la revalorisation du logement social, la rénovation du bâti ou la lutte contre les logements inoccupés. Face à une urgence sociale qui touche des millions d’Européennes et d’Européens, l’Union européenne ne peut pas se contenter d’encourager ; elle doit protéger.
Or, la Commission von der Leyen II évite systématiquement d’imposer des règles plus strictes, en renonçant à agir sur la protection des locataires, les expulsions abusives, l’encadrement des loyers ou le droit opposable au logement, comme si le marché pouvait résoudre seul une crise qu’il a pourtant largement créée. Et lorsqu’elle décide enfin de légiférer, c’est souvent au nom de la « simplification » — une approche dont les précédents paquets Omnibus ont déjà montré les dérives.
La réforme annoncée des règles sur les aides d’État est à cet égard particulièrement inquiétante. En créant une catégorie floue de “logement abordable” sans garanties solides, la Commission risque de détourner des ressources publiques cruciales du logement social vers des projets plus rentables, alimentant ainsi la financiarisation et la spéculation immobilière qu’elle prétend combattre.
Enfin, ce Plan passe sous silence des enjeux pourtant centraux : le logement comme déterminant majeur de santé publique, alors qu’une personne sur sept vit dans un logement insalubre dans l’Union européenne ; la protection effective contre les expulsions ; ou encore la possibilité pour les États d’investir massivement dans le logement social sans être entravés par des règles budgétaires rigides et dépassées.
Tant que ces angles morts ne seront pas traités, l’Europe restera en décalage avec l’une des premières préoccupations des citoyennes et des citoyens. Le droit au logement ne peut pas être subordonné aux logiques de rentabilité ou aux dogmes budgétaires. »

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