Dans l’agitation, la France continue de se distinguer… sur le nucléaire

14 décembre 2009
Regards

Nouveau record d’affluence ce matin au COP15. Les règles d’entrée au centre des négociations sont en train d’être revues drastiquement : trop de badges ont été donnés la première semaine aux ONG et les organisateurs paniquent. Dès demain, les ONG devront diminuer le nombre de leurs représentants. On assiste ainsi devant le Bella Center à des scènes où la police doit bloquer les délégués non encore accrédités, à qui on demande de patienter jusqu’à… six heures. Il y a aussi foule en salle de presse où un grand nombre d’équipes sont arrivés en prévision de celles des chefs d’État. Paradoxe de voir toute cette foule venir à Copenhague alors qu’au moment, çà clashe dans les couloirs. Les pays africains ont suspendu ce matin leur présence aux négociations, avant d’avoir la certitude que les négociations en cours ne négligeraient pas la question de la poursuite du protocole de Kyoto, seul instrument juridique pour le moment contraignant. Les États-Unis et la Chine n’en étant pas signataires, il est question ici de trouver un accord plus large. Mais les pays émergents aimeraient qu’une double approche soit poursuivie : prolonger le protocole de Kyoto et conclure un autre accord incluant les plus grands pollueurs, mais qui soit moins contraignants pour eux.

De son côté, Borloo poursuit sa mission de représentation de la France, qu’il veut absolument imposer comme le pays « leader » de la négociation. Difficile de savoir comment cela est perçu depuis Paris, mais, ici, la belle et fantastique histoire de Copenhague à la mode Sarkozy ne fait pas recettes. Surtout qu’il est difficile d’être dupes quand au même moment, le gouvernement français annonce dans le cadre du grand emprunt le développement des réacteurs nucléaires de 4e génération. « La France poursuit ses illusions énergétiques et entretient sa triste différence – séquestration du carbone et nucléaire », déclare l’eurodéputé Yannick Jadot (Europe Ecologie), atterré. « A l’heure de Copenhague, il vaudrait mieux investir dans les économies d’énergie et les énergies renouvelables », ajoute le réseau Sortir du nucléaire.

A côté de cela, les activistes ne se découragent pas, malgré le froid, et poursuivent les actions en tout genre. Ce matin, c’était la manifestation des NoBorders pour rappeler que les enjeux migratoires ne doivent pas être oubliés dans la négociation. Aux cris de « No borders, No nations, Stop deportation ! », la foule plutôt bon enfant s’est dirigée vers le ministère de la Défense avant de tenter de décrocher l’un des innombrables planisphères financés par je ne sais quel sponsor privé, qui sèment les rues de Copenhague. L’encadrement policier est toujours impressionnant mais son relatif fair-play impressionne quand même un peu tant on est habitué à d’autres pratiques en France. Cela n’empêche pas les nombreuses arrestations et les contrôles préventifs mais on sent, comme l’a rappelé le porte-parole de la police, qu’il s’agit ici de faire le contraire de ce qui s’est passé lors du sommet de l’Otan en mars dernier. Reste à voir ce qui se passera mercredi prochain, durant lequel est organisé une marche sur le Bella Center (Reclaim the power, http:/…justice-action.org/news/2009/08/14/december-16th-18th/ ), afin que les « négociateurs entendent la voix de la société civile ». On suivra cela depuis l’intérieur, des interruptions de séance par les activistes étant annoncés…

Enfin pour finir, un clin d’œil à nos amis les Yes Men. Difficile de savoir à cette heure si ce sont eux qui ont frappés ce matin, mais cela y ressemble fort. Introduits par l’Ouganda, un représentant du Canada avait annoncé la décision de son pays de réduire de 40 % ses émissions de gaz à effet de serre d’ici 2020 et doubler la mise d’ici à 2050. A voir ici (http://en.cop-15.org/news/view+news_newsid=12888.html ). Le Canada a depuis démenti. Mais dans l’ambiance tendue de la journée – les pays africains quittent les négociations, les conférences de presse s’annulent en chaîne (États-Unis, UE, G77 et Chine)-, on a cru une minute que les pays du Nord avaient enfin pris conscience de leurs responsabilités.

14 décembre 2009 – Emmanuelle Cosse

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