Incident nucléaire en Ukraine : tout va bien, mais rien ne va plus en Europe à l’approche de l’hiver
Réaction de Michèle Rivasi, députée européenne écologiste, fondatrice de la Criirad (Commission de recherche et d’information indépendantes sur la radioactivité) et de Nuclear Transparency Watch (NTW), réseau européen (comprenant des membres en Ukraine) de vigilance pour la sûreté nucléaire :
« D’après les informations de première main que j’ai obtenues de représentants de la Commission européenne à Kiev, il n’y aurait pas de danger imminent. Un transformateur électrique aurait pris feu suite à un court-circuit, entraînant la mise à l’arrêt automatique du réacteur. C’est un problème qui est loin d’être surprenant et pourrait devenir récurrent, en Ukraine et ailleurs : la vétusté des installations couplée à une forte demande d’électricité due à l’arrivée du froid pourrait faire apparaître d’autres incidents similaires et récurrents. La pénurie d’énergie et le rationnement conséquent devraient affecter durablement l’Ukraine ».
« Même si l’alerte semble être levée, il y a de nombreuses raisons de s’inquiéter des risques nucléaires en Ukraine, et notamment à celle de Zaporizhye. Les tirs de missiles sont fréquents dans la région et pourraient frapper – de manière volontaire ou non – une centrale nucléaire. Par ailleurs, du combustible usagé a été envoyé en août dernier de la Hongrie vers la Russie, à travers l´Ukraine alors déjà en guerre civile. L´Union Européenne n´a rien fait pour garantir la sécurité de ces transports, dont la légalité est fortement remise en question. La Commission européenne qui était avertie depuis plus d´un an déjà par des ONG – dont NTW – ne semble pas vouloir se saisir de ce dossier pourtant grave pour les populations concernées par ces échanges. Le risque de prolifération nucléaire est bien réel dans la région ».
« De manière générale cet incident sur le transformateur peut affecter n’importe quel pays, n’importe quelle centrale, comme ça a été le cas ce dimanche pour le réacteur de Tihange 3 en Belgique. Dès lors se pose la question du risque de black-out dans certaines régions d’Europe, ce qui est le cas en Belgique où la moitié de la capacité nucléaire est à l’arrêt pour des problèmes de microfissures dans des cuves de réacteurs ou de sabotage. La France elle-même est dans une situation problématique, dépendant chaque hiver d’un approvisionnement extérieur en électricité, du fait d’une politique passée ayant favorisé l’usage du chauffage électrique et s’étant désintéressée de l’importance d’une isolation thermique efficace des logements ».
« Les survols de drones en France font toujours planer le doute sur les intentions de leurs auteurs : une action terroriste ciblée et simultanée sur plusieurs transformateurs de centrales nucléaires pourrait provoquer un black-out régional, national, voire même européen avec des conséquences humaines et économiques désastreuses. Les autorités doivent apporter des réponses concrètes aux doutes et craintes des Français».