François Alfonsi sur les droits des minorités nationales ou ethniques, religieuses et linguistiques
Jeudi 15 décembre, François Alfonsi est intervenu à l’occasion du 30e anniversaire de la déclaration des Nations unies sur les droits des personnes appartenant à des minorités nationales ou ethniques, religieuses et linguistiques.
Son intervention ⬇️
« À l’instigation de l’intergroupe Minorités et traditions du Parlement européen, les groupes PPE et Verts/ALE avaient proposé qu’une résolution sur les droits des minorités soit proposée au vote du Parlement à l’occasion du 30ᵉ anniversaire de la Déclaration des Nations unies sur les droits des personnes appartenant à des minorités linguistiques, religieuses, ethniques ou nationales. Les autres groupes n’ont pas appuyé cette demande et, lors du vote sur notre agenda de session, une majorité très étroite a été dans leur sens. Deux voix d’écart seulement. Je le regrette.
Cette question des minorités, depuis que les Nations unies ont adopté cette déclaration, est gravement sous estimée par les institutions européennes, y compris par notre Parlement. Dans les années 90, plusieurs textes ont été élaborés et votés dans ce Parlement et au Conseil de l’Europe : la Charte européenne des langues régionales, la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales. Et ces textes ont participé à la définition des critères de Copenhague qui fondent, depuis 1993, le socle des valeurs de l’Union européenne. Malheureusement, ces deux décennies ont érodé l’intérêt pour ces thématiques essentielles à la cohésion de l’Union européenne et au respect de ce qui en est la devise : « L’Union dans la diversité ».
Pourtant, comment ignorer l’importance de ces questions ? À l’international, comme en Syrie et en Irak, où l’État islamiste avait fait de la persécution des minorités religieuses et ethniques l’essentiel de ses méfaits. Ou encore à propos de l’Arménie et du Nagorno-Karabakh. Au Sahel, où les conflits ethniques expliquent l’essentiel de l’emprise gagnée par les islamistes de Daesh. Ou encore en Ethiopie. Les Ouïgours, en Chine, etc.
Le recul de l’Union européenne sur ces questions affecte, à mon sens, la bonne appréhension de ces conflits par notre service de l’action extérieure comme par la plupart des diplomaties européennes.
À l’intérieur de l’Europe, ces questions sont, tout autant, d’actualité. Les critères de Copenhague ne sont toujours pas ratifiés par un pays comme la France et le rapporteur spécial des Nations unies a, encore récemment, déploré la censure d’une loi adoptée pour l’enseignement des langues régionales. Les raisons viennent de loin. Elles viennent de l’histoire conflictuelle des États à laquelle la construction de l’Europe veut apporter une réponse durable. Or, le recul sur ces thèmes est sensible et compromet la stabilité de l’Union.
Je veux attirer l’attention, notamment, sur les décisions déplorables qui sont prises en ce moment dans certains pays contre les minorités russophones en raison de l’action de Vladimir Poutine. Il faut veiller à empêcher ce type de mesures qui, loin de construire la paix, risquent d’accroître les problèmes.
Voilà le débat qui est en jeu. Je ne doute pas que le Parlement s’en emparera pleinement à l’avenir. »
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