Mounir Satouri sur la situation en Tunisie
Mercredi 19 octobre, Mounir Satouri est intervenu sur la situation en Tunisie.
Son intervention ⬇️
« Parfois, c’est en se rendant sur place qu’on prend la mesure d’une réalité. Qu’on arrive
à sentir la température. Et j’ai eu l’occasion, début septembre, de me rendre en Tunisie, de rencontrer des acteurs de la société civile, des défenseurs des droits humains, des Tunisiennes, des Tunisiens.
Je suis allé à Tunis et puis, j’ai fait le trajet jusqu’à Tabarka, rencontrer une jeune maire, élue à l’occasion d’un scrutin partiel, qui est poursuivie par les autorités nationales parce qu’elle a osé permettre à des jeunes diplômés au chômage de gagner un peu d’argent en tenant les plages et en proposant des chaises et des parasols durant l’été.
La liste des reculs, et je tiens à vous l’assurer, démocratiques, est très longue.
État d’exception devenu pérenne.
Élections sans transparence.
Attaques judiciaires contre les responsables politiques.
Procès militaires contre les civils.
Intimidation des élus locaux.
C’est ça, la réalité tunisienne, aujourd’hui.
Le basculement sécuritaire et antidémocratique détricote chaque acquis de la révolution tunisienne. Vous savez, ce grand mouvement de soulèvements dans le monde arabe que nous avions soutenu. On s’est dit : « Enfin ! Peut-être qu’un processus démocratique est là et nous devons le soutenir. »
Quand j’y suis allé, les ONG, les associations parlaient encore de manière ouverte. Ils acceptaient même qu’on cite le nom de leur association, leur nom personnel. Ce n’est plus le cas depuis quelques jours. J’ai eu l’occasion d’échanger avec des associations. Elles me disent : « Surtout tu ne nous cites pas. Tu ne donnes ni notre nom ni l’organisation à laquelle on appartient. » Vous voyez qu’aujourd’hui, après avoir détricoté les institutions, c’est les associations, la société civile qui est attaquée. Il y a 20 000 associations en Tunisie qui avaient participé aux lois contre les violences faites aux femmes, contre les discriminations, contre la corruption. C’est ça qui est menacé et c’est grave pour l’Union européenne parce qu’à Tunis, il y a aussi des associations qui, à partir de la Tunisie, travaillent, à travers nos programmes, pour la Libye, pour la Palestine. Donc, ce qui se passe en Tunisie n’est pas simple.
L’Europe doit voir clair dans ce qui se joue en Tunisie et dans ce qu’est en train de mettre en place le président Kaïs Saïed. Oui, il faut soutenir la Tunisie. Il faut permettre aux Tunisiens de faire face à la crise de la COVID, la crise énergétique. Il faut donner de l’argent, mais il faut soutenir les citoyens, soutenir les acteurs, soutenir la démocratie parce que c’est notre responsabilité et parce qu’il en va
de notre honneur. »
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