Taxons les pollueurs pour un monde meilleur
Et si on taxait la pollution plutôt que le travail ? Les systèmes de taxations sont inadaptés face au paysage socio-économique actuel et aux enjeux de durabilité. Alors que le G20 se réunit pour parler de l’avenir de la taxation au niveau mondial, l’eurodéputé écologiste Claude Gruffat rappelle que des études récentes ouvrent la voie à une taxation plus juste au service d’un avenir plus durable. Une nouvelle approche qu’il portait récemment dans un rapport parlementaire, rejeté par une alliance de l’extrême droite, de la droite mais aussi des libéraux.
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L’économie des 30 Glorieuses était avant tout manufacturière et les salaires y représentaient la plus grande partie des revenus. Depuis, l’incidence fiscale s’est déplacée de la richesse vers le revenu, du capital vers la consommation et le revenu du travail, des entreprises multinationales vers les PME, et du secteur financier vers l’économie réelle. L’avènement du numérique a accéléré cette tendance, remettant en question la justice fiscale pourtant indissociable du vivre ensemble.
Des études d’ONG et d’institutions internationales telles que le Fonds monétaire international (FMI) ou l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) ont ouvert ces derniers temps la voie à des avancées concrètes pour répondre aux nécessités absolues de protection de l’environnement et d’instauration d’une justice sociale, deux des défis principaux des années à venir.
Dans un monde en crise où chaque milliard compte pour aider les plus fragiles et répondre au défi climatique et environnemental, laisser perdurer de telles distorsions de traitement est criminel. L’Union européenne comme le G20 doivent d’urgence replacer la question fiscale au centre du débat politique, non pas pour taxer plus mais pour taxer mieux et offrir un nouveau contrat social aux citoyen.ne.s.
Il est temps de déplacer l’incidence fiscale du travail vers la pollution pour une société plus équitable et plus écologique. Quelques pistes pensées dans le cadre européen mais valables ailleurs :
1/ La fiscalité doit être plus forte sur les nuisances environnementales afin d’encourager les changements de pratiques :
- Fin des exonérations fiscales pour le fuel maritime et aérien afin de garantir des conditions de concurrence équitables et une relance économique post Covid neutre pour le climat.
- Mise en place de taxes sur l’extraction de ressources naturelles et la déforestation.
- Mise en place de taxes sur les déchets (notamment nucléaires) et l’incinération.
- Mise en place de redevances basées sur la distance dans le secteur des transports.
- Taxation des engrais et des pesticides.
- Une fiscalité véritablement redistributrice au bénéfice des plus vulnérables
- Réorientation de la fiscalité du travail vers la pollution.
- Élargissement de l’assiette fiscale, notamment vers le capital et la richesse
- Mise en place d’un système fiscal juste et transparent qui n’offre plus d’exemptions sectorielles (aérien, maritime…)
- Des mesures compensatoires pour les ménages les plus fragiles
- Une fiscalité au service de l’économie européenne qui protège les PME (99% des entreprises européennes, 2/3 des emplois privés)
- Une politique de simplification pour réduire le désavantage subi par les PME face aux multinationales.
- Une taxation accrue des multinationales, en particulier des géants du numérique.
- La lutte contre l’évasion fiscale massive pratiquée par les grandes entreprises.
- Le soutien aux efforts du G20 et de l’OCDE sur l’imposition des bénéfices à l’endroit où se déroulent les activités économiques.
- Un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières permettant notamment aux plus petites entreprises de mettre en œuvre la tarification du carbone dans leur chaîne de produits.
- Une initiative au niveau des Nations unies ou du G20 pour permettre à tous les pays d’appliquer une taxe carbone adaptée à leurs différents niveaux de développement économique et social.
Références :
- Le rapport (non adopté en Commission) de Claude Gruffat sur la taxation durable sur le site du Parlement européen : en version française / in english.
- Le think tank néerlandais Ex-Tax qui travaille sur le transfert progressif de la fiscalité du travail sur celle des externalités négatives environnementales
- World Bank’s report of 27 May 2020 entitled ‘State and Trends of Carbon Pricing 2020’
- OECD report of the 9 October 2020 entitled « Green budgeting and tax policy tools to support a green recovery »
- OECD report of 19 May 2020 entitled ‘Tax and Fiscal Policy in Response to the Coronavirus Crisis: Strengthening Confidence and Resilience
- OECD report of 15 October 2019 on entitled ‘Taxing Energy Use 2019: Using Taxes for Climate Action’
- OECD report of 11 September 2019 entitled ‘Tax Morale: What Drives People and Businesses to Pay Tax?’
- European Commission report of 2020 entitled ‘Taxation Trends in the European Union’,
- European Commission survey of 2020 entitled ‘Tax policies in the European Union’
- European Commission communication of 15 July 2020 entitled ‘An Action Plan for Fair and Simple Taxation Supporting the Recovery Strategy’ (COM(2020)0312)
- International Monetary Fund (IMF) Special Series note on COVID-19 of 16 December 2020 on tax policy for inclusive growth after the pandemic,
- IMF policy paper of 10 March 2019 on corporate taxation in the global economy
- IMF policy paper of 1 May 2019 entitled ‘Fiscal Policies For Paris Climate Strategies – From Principle To Practice’,
- Conclusions of the mission to the EU of the UN Special Rapporteur on extreme poverty and human rights, Olivier de Schutter, which identified tax competition in the EU as one of the obstacles to reducing poverty
- European Environment Agency Report No 17/2016 of 6 September 2016 on environmental taxation and EU environmental policies
- European Environment Agency report Ageing population, emerging technologies and fiscal sustainability can influence EU’s path to sustainable future
- Ainsi que le travail de nombreuses ONGs : Transport&Environement, European Environmental Bureau (EEB), Accountancy Europe, IISL…
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