
L’UE ne peut plus être complice des crimes du Rwanda en RDC
Face à la situation dramatique qui se déroule à Goma et dans la région du Nord-Kivu en République Démocratique du Congo (RDC), j’ai décidé d’adresser une lettre au Commissaire Jozef Síkela, chargé des partenariats internationaux.
En novembre dernier, celui-ci m’avait affirmé qu’il n’était pas au courant de la présence de l’armée rwandaise ou de son soutien au groupe armé M23 en RDC, ni même de leurs violations des droits humains récurrentes, comme l’utilisation du viol comme arme de guerre ou le recrutement d’enfants-soldats. Il ne semblait pas non plus avoir connaissance du pillage systématique des ressources minières de la RDC au profit du Rwanda.
Pourtant, toutes ces exactions sont largement documentées, notamment par les Nations Unies. Le dernier rapport en date, publié en décembre 2024, révèle l’ampleur du contrôle du M23 sur les régions minières du Nord-Kivu. Les minerais pillés en RDC sont injectés illégalement dans les circuits légaux de distribution ou sont introduits par contrebande au Rwanda, où ils sont assimilés à la production nationale. Ces pratiques ont entraîné « la plus grande contamination jamais enregistrée à ce jour des chaînes d’approvisionnement en minéraux dans la région des Grands Lacs » selon le dernier rapport d’experts de l’ONU. Malgré ces faits accablants, l’Union européenne a signé, la même année, un accord d’entente avec le Rwanda pour développer son approvisionnement en minerais stratégiques pour la transition énergétique. Or, ces minerais sont, pour une large part, extraits illégalement en RDC au prix de crimes contre l’humanité : ce sont les tristement célèbres « minerais de sang ».
Face à ces éléments et à l’aggravation de la situation à Goma, j’ai écrit à nouveau au Commissaire Sikela pour lui fournir les rapports de l’ONU et lui demander de mettre un terme à cet accord avec le Rwanda. L’Union européenne ne peut plus se rendre complice de crimes contre l’humanité sous prétexte de sécuriser son approvisionnement en matières premières stratégiques.
Kaja Kallas, la haute représentante de l’UE, doit aller au-delà de simples déclarations condamnant le M23. Nous devons exiger que Paul Kagame respecte le droit international, que l’armée rwandaise se retire du Rwanda, qu’elle arrête son soutien au M23 et que les responsables des crimes de guerre soient traduits en justice. Pour cela, il faut mobiliser les leviers politiques et économiques à notre disposition : nous devons suspendre l’accord d’entente avec le Rwanda, imposer un embargo sur les minerais provenant du Rwanda et stopper tout financement des activités militaires du Rwanda.
Il est urgent que l’Europe prenne ses responsabilités et mette fin à cette complaisance coupable face aux atrocités commises au Nord-Kivu.
Mounir Satouri
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