Epandages aériens de pesticides : stop aux dérogations

21 janvier 2013
L’épandage aérien des pesticides est interdit, et les exceptions à la règle sont extrêmement encadrées par le droit européen. Cependant, cette technique aux conséquences désastreuses pour la flore, la faune et la santé publique a encore libre cours dans certains pays d’Europe où des dérogations abusives sont accordées. Récemment, le tribunal administratif de Basse-Terre en Guadeloupe a annulé l’une de ces dérogations. Une bonne nouvelle, pour les eurodéputés EELV Catherine Grèze et Jean-Jacob Bicep.
L’épandage aérien de pesticides est une technique à la fois nocive pour l’environnement et pour la santé humaine, utilisée par dérogation dans différents départements français. Ces dangers sont non seulement liés à la toxicité des produits déversés (comme la déltaméthrine et la cyperméthrine, dont des études scientifiques prouvent la dangerosité) mais également aux risques liés à la technique elle-même, étant donné que la pulvérisation ne permet pas un contrôle suffisant de la propagation des substances utilisées.

Celles-ci se retrouvent présentes sur les terres environnantes, les nappes phréatiques, dans les habitations proches, et peuvent entraîner des effets néfastes à long terme pour la faune et la flore. Une étude américaine démontre par exemple que des résidus de pesticides persistent dans les moquettes des habitations dans un rayon allant jusqu’à 1250 mètres autour des zones d’épandage, et ce durant 730 jours !

Dérogations abusives

C’est précisément du fait de ces dangers avérés et reconnus que l’épandage aérien de pesticides est interdit, en principe. Il l’est à la fois par une directive européenne, la directive 2009/128/CE relative à une utilisation des pesticides compatible avec le développement durable et par la loi de Grenelle 2 au niveau français. D’autre part, certains textes européens, comme les directives « Habitats », « Oiseaux », ou encore la directive cadre sur l’Eau, présentent, de fait, un cadre juridique contraignant, auquel la pulvérisation de pesticides contrevient régulièrement.

Ces législations permettent néanmoins des dérogations, mais dans des cas théoriquement très stricts. Par exemple, la directive européenne exige, pour que les dérogations soient reconnues conformes au droit de l’UE, qu’aucune autre solution viable ne soit possible ou que la pulvérisation aérienne présente des avantages manifestes, du point de vue des incidences sur la santé humaine et l’environnement, par rapport à l’application terrestre des pesticides. La directive exige également que des mesures garantissant l’absence d’effets nocifs pour la santé des passants soient appliquées. Si l’on peut contester, aux vues des dangers pour la santé publique et pour l’environnement, au nom du principe de précaution, le bien-fondé de l’autorisation de dérogations, il est encore plus inquiétant de constater que le droit est régulièrement violé et que des dérogations abusives sont accordées dans les Etats-membres.

Intérêts économiques

Pourquoi autoriser une telle pratique, au mépris du droit, de la santé publique, au mépris de la justice environnementale ? Catherine Grèze et Jean-Jacob Bicep, eurodéputés EELV, dénoncent régulièrement ce chantage aux intérêts économiques particuliers et de court-terme. La banane en Guadeloupe ou en Martinique, la vigne et le maïs dans le Sud-ouest, quelques-uns de leurs producteurs et quelques entreprises de pesticides ne valent pas plus que le devoir de justice et de raison que les autorités publiques doivent appliquer. Ils ont ainsi à plusieurs reprises interpellé les préfectures, le gouvernement et la Commission européenne.

En ce début d’année 2013, le combat pour la sagesse et l’intelligence politique n’est pas perdu. Le 10 décembre 2012, le tribunal administratif de Basse-Terre, en Guadeloupe, a rendu public son jugement annulant les arrêtés préfectoraux de juillet et octobre 2012, qui autorisaient des dérogations à l’interdiction de l’épandage aérien. Considérant que « le préfet de Guadeloupe a insuffisamment évalué la situation et méconnu l’étendue des pouvoirs que lui confère le code rural dans l’intérêt de la santé publique et de la protection de l’environnement », le Tribunal administratif a ainsi tranché, sans ambigüité, en faveur du respect du droit.

Cette décision de justice, véritable sonnette d’alarme doit résonner dans les préfectures, les Etats-membres et jusqu’à Bruxelles, pour faire entendre la voix de la raison, celles que les responsables du scandale du chloredécone n’avaient pas entendue : les dérogations sont un piège au détriment de la santé humaine et de l’environnement et l’écologie est notre bien le plus précieux.

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