Jean-Claude Juncker au défi de la justice sociale

6 novembre 2014
Les Verts au Parlement européen se félicitent de la publication des dessous du système fiscal luxembourgeois. Selon la Commission Européenne, la fraude et l’évasion fiscales privent chaque année les trésors publics des États-membres de 1.000 milliards d’euros de recettes.
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Réagissant à ces révélations, Philippe LAMBERTS, Président du Groupe des Verts/ALE et Eva JOLY eurodéputée et spécialiste des paradis fiscaux ont estimé que:

« Si de trop nombreux États-membres de l’UE rivalisent de trucs et ficelles pour indécemment séduire les entreprises, le Grand-Duché du Luxembourg fait partie de ceux qui, comme les Pays-Bas ou l’Irlande, ont érigé ces pratiques au rang d’industrie nationale. L’enquête ouverte par la Commission européenne à leur encontre, à l’initiative du Commissaire sortant Joaquin Almunia, était donc plus que nécessaire. En ces temps où les finances publiques ont été mises à mal par le sauvetage du secteur financier, ce sont les bases mêmes de l’État social qui sont minées par ce qui s’apparente à du racolage fiscal.

Ces révélations ne constituent pas une véritable surprise, mais donnent une base factuelle aux soupçons qui pesaient sur le Grand-Duché, dont le nouveau gouvernement – auquel les Verts participent – semble avoir l’intention de rompre avec ces pratiques, des pratiques qui se sont développées sous le gouvernement d’un certain Jean-Claude Juncker (1). Le nouveau président de la Commission européenne a choisi de confier plusieurs portefeuilles à des commissaires à contre-emploi : la régulation financière à l’ex-lobbyiste britannique Jonathan Hill, la discipline budgétaire au Français Pierre Moscovici, le climat à l’Espagnol Miguel Arias-Cañete, proche de l’industrie pétrolière pour ne citer que quelques exemples. S’il espérait que ceux-ci démentent par leur action les soupçons qui pèsent sur eux, à son tour de prouver qu’il est capable de s’attaquer sérieusement à la fraude et à l’évasion fiscale : la notation « triple A social » qu’il appelait l’Union Européenne à mériter est à ce prix.

Nous appelons le Conseil et la Commission européenne à mettre au sommet de leurs priorités la fin de cette guerre fiscale, dont seules les multinationales et les hauts patrimoines sont bénéficiaires, au détriment des citoyennes et citoyens de l’Union. Les éléments-clés d’un tel processus de désarmement fiscal sont déjà identifiés :

• La mise en place d’une assiette commune et consolidée pour l’impôt des sociétés (ACCIS, CCCTB en anglais), qui donnera une définition unique du profit taxable et le répartira sur une base objective entre les États-Membres; elle devra s’accompagnée par l’adoption d’une convergence des taux d’imposition, en ce compris un taux plancher;
• L’extension de la transparence comptable pays-par-pays (country-by-country reporting), déjà applicable aux entreprises extractives, forestières et… bancaires, aux grandes entreprises de tous les secteurs;
• L’obligation de publication de tous les arrangements fiscaux (tax rulings) dont bénéficient les entreprises;
• La mise en place, telle que votée par le Parlement Européen, d’un registre public sur les bénéficiaires effectifs de tous les instruments financiers opaques (fondations, trusts etc…) utilisés comme véhicules de l’évasion et de la fraude.

Jean-Claude Juncker affirmait lors de son investiture qu’il présidera la Commission « de la dernière chance » : s’il veut la saisir et retrouver la confiance de nos concitoyens, il doit faire de la justice fiscale son premier combat. »

(1) Jean-Claude Juncker a été premier ministre du Luxembourg de 1995 à 2013, après en avoir été le ministre des finances de 1989 à 1995.

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