L’industrie du tabac ne doit pas bloquer les politiques de santé publique en Europe

10 janvier 2013
Le 16 octobre 2012, le commissaire européen en charge de la santé quitte ses fonctions sur ordre du président Barroso. Après ce coup d’éclat qui révèle une affaire de corruption dans le cadre de la révision d’une directive européenne sur le tabac, les accusations portées à l’encontre du Maltais John Dalli s’effritent rapidement. Pour les écologistes qui ont mené leur propre enquête, les dysfonctionnements des instances de contrôle, d’éthique et de lutte anti-fraude sont manifestes… et démontrent une trop grande complaisance à l’égard du puissant lobby du tabac au détriment de l’intérêt général.

Un manque total de transparence

A l’automne 2012, la démission de John Dalli se déroule dans la plus grande opacité. Alors que la Commission du contrôle budgétaire du Parlement européen commence à poser une série de question à l’Office européen de lutte anti-fraude (Olaf) et à l’entreprise suédoise qui est à l’origine de cette affaire, le malaise persiste. Le dossier constitué par l’Olaf, désormais dans les mains de la justice maltaise, est devenu inaccessible. John Dalli lui-même ne semble pas savoir ce qui lui est précisément reproché. Le scénario du piège tendu par l’industrie du tabac à John Dalli dans l’espoir de provoquer sa démission – et ainsi de repousser la signature de sa directive sur le tabac en Europe – devient crédible.

Pour les écologistes José Bové et Bart Staes qui ont organisé une conférence de presse ce 9 janvier 2012, le Parlement européen ne doit pas rester impassible face à ces zones d’ombre. Ils ont demandé officiellement la mise en place d’une commission spéciale du Parlement européen qui mènerait sa propre enquête.


Affaire Dalli : un manque total de transparence

Plus d’éthique et de contrôle

Ce « Dalligate » pose la question fondamentale des relations entre les lobbyistes représentant l’industrie du tabac et les dirigeants européens. Les règles existantes permettent-elles d’encadrer suffisamment ce rapport de force ? Ces règles sont-elles respectées ? La réponse est non. Déjà, en 2001, lors de la rédaction et de l’adoption de la première directive européenne sur le tabac, les attaques des lobbies du tabac craignant une baisse des ventes avaient été nombreuses. La persévérance du commissaire de l’époque avait néanmoins permis une première législation européenne sur le tabac de voir le jour. Depuis 2009, la révision de ce texte est sur la table… en février 2012, la première version est prête à sortir des bureaux de la direction générale Santé de la Commission européenne, et à franchir les étapes successives du processus législatif.

« Le lobbying pratiqué par les grandes industries du tabac a toujours été intense et difficile à combattre », explique José Bové. Les pressions de ces multinationales sur les gouvernements, ou la manipulation des recherches scientifiques, ont finalement poussé l’Organisation mondiale de la santé (OMS) à édicter un code de conduite pour lutter contre de telles pratiques. « En cas de nécessité, les réunions doivent être tenues dans la plus grande transparence. Des comptes-rendus indiquant les sujets abordés et les personnes présentes doivent être rédigés et rendus publics. Le code de conduite de l’OMS pour la lutte contre le tabac est légalement contraignant. Les fonctionnaires européens et les hommes politiques doivent impérativement le respecter », poursuit l’eurodéputé EELV.


Affaire Dalli : plus d’éthique et de contrôle

La Commission mise en cause

Si John Dalli admet avoir rencontré, en violation de cette réglementation de l’OMS, une avocate payée par le lobby du tabac, les associations qui luttent contre le tabac ont pu répertorier six autres entrevues litigieuses mettant en scène plusieurs membres de la Commission européenne. Trois ont eu lieu avec des personnes du cabinet du président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, et trois avec des personnes du cabinet de Catherine Day, la secrétaire générale de la Commission européenne. Ces réunions enfreignent tout autant le code de conduite de l’OMS que celle qui a provoqué la démission du Commissaire en charge de la santé.

Les politiques de santé publique doivent être menées dans l’intérêt général et non dans l’intérêt commercial des entreprises privées. C’est pourquoi l’Union européenne doit renforcer les règles éthiques qui encadrent les accords conclus entre les lobbies et les dirigeants politiques, et donner un droit de regard aux parlementaires qui représentent les citoyens. Les conflits d’intérêts minent les institutions européennes et décrédibilisent la communauté des Etats-membres, les dirigeants européens doivent réagir !


John Dalli : la commission mise en cause

– Pour avoir plus de détails sur la démission de John Dalli et l’enquête menée par les eurodéputés écologistes José Bové et Bart Staes, lire l’article Dalligate – lobby du tabac : pour la mise en place d’une commission ad hoc sur le site Internet de José Bové.
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Un commentaire

  • Justine dit:
     - 

    Nous sommes atterrés par de telles pratiques de corruption au sein de ceux qui devraient oeuvrer au Bien Commun, pour l’équilibre, la santé et la justice des peuples . Que faire pour rétablir le souci de l’éthique au sein de nos divers gouvernants ? ?

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