L’Arabie Saoudite, miroir des lâchetés européennes

Ainsi donc, l’Arabie Saoudite est officiellement membre de la Commission de la condition de la femme des Nations unies. Cette élection, scandaleusement obtenue grâce aux voix de plusieurs États européens, constitue une faillite morale symptomatique de l’époque.
 
L’Europe est décidément malade de ses relations avec les pétro-monarchies. On vit au quotidien, en France, les relations incestueuses entre certains cercles du pouvoir et le peu démocratique Qatar, que l’on se garde bien de critiquer, même face aux preuves les plus flagrantes d’atteintes gravissimes aux droits humains. On connaît également l’usage qui est fait des armes françaises vendues à nos « amis » Saoudiens et dont l’usage contribue activement à la pire crise humanitaire de l’époque.

Une diplomatie du portefeuille très efficace

L’élection de l’Arabie Saoudite au sein de la Commission de la condition de la femme des Nations Unies à partir de 2018 et jusqu’en 2022, vient appuyer encore un peu plus la sensation de naufrage moral. En effet, celle-ci a été rendue possible par l’apport de 5 voix européennes. L’élection ayant eu lieu à bulletin secret, on ne peut qu’émettre des hypothèses sur la nationalité des votants. Si la France, a officiellement voté contre, dans le respect de ses principes, les représentants belges sont quant à eux sur la sellette suite à leur vote favorable. Cette victoire saoudienne vient en tout cas valider une diplomatie du portefeuille qui fait régulièrement ses preuves.

Le pays champion du droit des femmes à ne pas avoir de droits

Pour rappel, l’Arabie saoudite, où l’on pratique un islam rigoriste, régi par la charia, sera chargé de promouvoir, aux côtés de 45 autres États, les droits des femmes, et notamment le droit à l’égalité des sexes. Une « décision absurde et moralement répréhensible », pour Hillel Neuer, de l’ONG UN Watch. En effet, chaque femme saoudienne doit avoir un tuteur masculin qui prend toutes les décisions importantes en son nom depuis sa naissance jusqu’à sa mort et se voit restreinte dans tous les aspects de sa vie sociale (accès à l’emploi, interdiction de conduire, de voyager sans autorisation, obligation de se voiler plus ou moins intégralement selon les régions, etc.). Le royaume, qui assure quant à lui protéger les femmes dans la mesure où la charia garantit l’égalité des sexes, avait tenu sa première grande réunion sur le sujet au mois de mars (en dehors du cadre de l’ONU). Sur l’un des clichés de l’événement, treize hommes occupaient la scène. Treize hommes et aucune femme, celles-ci ayant été obligées de se tenir… à l’écart, dans une pièce séparée, non-mixité oblige.

La transition énergétique : bonne pour la planète, l’économie et le respect de nos valeurs

En 2015, malgré les centaines d’exécutions – par décapitation entre autres – prononcées chaque année dans le royaume, le pays avait déjà été nommé à la tête de l’une des commissions consultatives de l’ONU sur les droits de l’Homme. Et ce alors même que de nombreux prisonniers continuent de croupir dans les geôles saoudiennes, à l’instar du blogueur Raif Badawi condamné en 2014.
Tant qu’elles ne seront pas sorties de leur dépendance aux importations d’hydrocarbures et aux exportations d’armes, les démocraties européennes resteront les obligées de l’Arabie Saoudite et des autres pétro-dictatures et devront continuer à baisser les yeux et la voix devant les violations des droits Humains les plus basiques. Seule la transition énergétique nous permettra – en plus de lutter contre le changement climatique – d’avoir une diplomatie enfin cohérente avec nos convictions.
Libérons nos démocraties de notre dépendance aux régimes dictatoriaux : sortons des énergies fossiles !

Photo : Ensaf Haidar, la femme de Raif Badawi lors de sa venue au Parlement européen afin de recevoir le Prix Sakharov décerné à son mari en 2015. © European Union 2015 – European Parliament
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