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Règlement établissant les obligations des opérateurs qui mettent du bois et des produits dérivés sur le marché: retour sur le vote du Parlement européen en seconde lecture

12 juillet 2010
Ils sont jolis, solides, peu chers. Les bois tropicaux (teck, acajou…) ont la cote dans nos salles de bain ou nos jardins. Néanmoins, ils proviennent souvent de forêts naturelles dont la gestion n’est pas durable.
On le sait aujourd’hui, entre 20 et 40 % du bois exploité dans le monde est abattu de façon illégale. Cette exploitation ne se limite pas aux forêts tropicales des pays du sud, elle est également d’usage en Europe et pays voisins. Cette exploitation a des conséquences considérables qu’elles soient humaines, socio-économiques, environnementales, tout est lié. Cette réglementation est indispensable mais elle doit se penser transversale.

1 – Etat des lieux et nécessité d’une législation pour plus de transversalité

Pourquoi une législation?

La Déforestation
– D’après le dernier rapport de la FAO, en 10 ans c’est 40 millions d’hectares de forêts primaires qui ont disparu
La déforestation entraîne la désertification et l’érosion des sols menaçant un nombre élevé d’écosystèmes et d’espèces liées aux forêts
La déforestation, c’est 20% des émissions de gaz à effet de serre, c’est la plus importante des contributions au dérèglement climatique
Il faut considérer que la forêt constitue un puits de carbone indispensable à la stabilité de notre climat, que les forêts sont les poumons de la terre, que les écosystèmes sont nécessaires à la qualité de l’eau et des sols. La vie humaine dépend de la biodiversité.

– Droit des populations indigènes et locales
Les droits de l’Homme sont en danger : L’exploitation illégale des forêts met à mal le mode de vie des populations indigènes dépendantes de ces forêts.
Grâce à une législation, il est possible de garantir le droit d’usage des ressources forestières par les populations locales, garantir le respect du fonctionnement des sociétés basées sur la forêt, garantir aux populations un développement soutenable et garantir une meilleure protection de leurs droits.

– Finances Publiques
l’évasion fiscale : le commerce illégal c’est de l’argent qui fuit, c’est une perte d’argent considérable (5 mds de dollars par an pour les pays en développement d’après la Banque Mondiale) ce sont de services publics non assurés. La réglementation empêchera les évasions fiscales, permettra de renflouer les caisses de l’Etat et assurera par exemple à la société l’accès à l’éducation et la santé.

– Concurrence déloyale et droit du travail
Le marché du bois illégal désavantage les sociétés forestières qui travaillent de façon responsable. Il s’agit clairement de la concurrence déloyale du bois illégal face au bois légal. C’est surtout l’exploitation des hommes dans l’illégalité; les travailleurs locaux sont pour le plus souvent surexploités, non rémunérés à la hauteur de leur travail et sans assurance maladie. 3.5 millions d’emplois en Europe dépendent du commerce du bois. La réglementation permettra de garantir une rémunération et des droits couverts pour les travailleurs au Nord comme au Sud.

– Consommateurs européens
Les consommateurs européens doivent pouvoir avoir confiance lorsqu’ils achètent des produits en bois, qu’ils soient assurés que ce bois est légal et que leurs achats ne contribuent pas à la destruction des dernières forêts primaires de la planète.

2 – Historique de la législation européenne

Objectif et résumé
Les députés européens souhaitaient interdire le commerce du bois abattu illégalement et renforcer les moyens de contrôle mais se sont heurtés cependant aux Etats membres, dont la position est beaucoup moins stricte.
Historique
C’est en 2003 que le combat contre le commerce de bois illégalement mis sur le marché a été évoqué par la Commission européenne. A cette date, la thématique était partie prenante du plan d’action FLEGT (Plan for Forest Law Enforcement, Governance and Trade).
En 2005, le Conseil a adopté le règlement FLEGT, établissant le cadre juridique pour les importations de bois dans l’UE, et a autorisé la Commission à ouvrir des négociations avec les pays producteurs dans l’objectif d’accords de partenariat volontaires (APV FLEGT) avec l’UE.
En octobre 2008, la Commission européenne a publié la proposition de règlement, établissant les obligations des opérateurs qui mettent du bois et des produits dérivés sur le marché. En décembre 2008, un projet de rapport, par la députée Caroline Lucas, a vu le jour au sein de la Commission Environnement du Parlement européen. Ce rapport a été adopté en première lecture par l’Assemblée plénière en avril 2009. Les vœux du Parlement européen ont été bloqués par les Etats membres, lors du conseil de l’agriculture de mars 2010. Le texte était donc en seconde lecture.

3 – Résultats du vote
Un compromis entre le PE et le conseil a été obtenu le 16 juin.
Le PE a voté le 7 juillet 2010. Le conseil doit voter à l’automne.

Résultat positif

L’interdiction du bois illégal a été acceptée, alors qu’elle avait été rejetée en première lecture. L’opposition était notamment menée par la Suède ainsi que d’autres pays, craignant pour leurs PME.

Un système de traçabilité est adopté. Les opérateurs au sein du marché de l’Union européenne devront établir un système de traçabilité pour les produits du bois depuis le premier point de vente. Dans le même temps, les entreprises de commerce basées dans l’UE ainsi que les propriétaires de forêts dans l’UE devront tracer la production depuis le pays de récolte et vérifier que les produits considérés n’ont pas de risque d’être illégaux.

Le règlement va envoyer un signal positif au marché européen et permettra d’initier des changements dans le système économique. Cela incitera les acteurs à mettre sur le marché du bois de source légale et de respecter des critères sociaux et environnementaux.

Résultat négatif

Les produits imprimés (livres, journaux), sont exclus de la réglementation.
Posera des soucis dans l’application, car en soit une feuille de papier vierge est soumise, une feuille imprimée non.

L’interdiction s’appliquera seulement deux ans après l’entrée en vigueur du texte.

Il n’y a pas de sanctions minimum dans le texte. La Directive relative à la protection de l’environnement par le droit pénal ne sera pas amendée. Le Parlement souhaitait faire inclure une référence au bois illégal et au commerce qui en résulte afin d’obtenir des sanctions pénales.

Pour conclure, le Parlement a fait preuve de responsabilité sociale, économique et environnementale en affichant sa détermination à apporter des solutions à des problèmes d’ordre mondial.

4 – Etat des lieux des législations similaires dans le reste du monde

Le gouvernement australien considère actuellement un projet de loi pour l’interdiction du commerce du bois illégal. La décision devrait être imminente d’après dernière actu de fin mai.
Les Etats Unis ont adopté leur législation, un amendement au Lacey Act, en mai 2008, qui interdit le commerce de bois illégal et intègre un régime strict de sanctions. Cette législation, maintenant en vigueur, a d’ailleurs été expérimentée fin 2009, lors d’une enquête de bois exploité illégalement à Madagascar.

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