Visite présidentielle en Azerbaïdjan: on ne construit pas la paix dans la région sans une société civile libre de s’exprimer
Michèle Rivasi, responsable de la délégation Europe Ecologie au Parlement européen, réagit:
« Depuis Erevan où je me trouve pour commémorer le centenaire du génocide arménien, je voudrais saluer les efforts de François Hollande et son engagement personnel pour tenter de résoudre le conflit au Nagorno-Karabakh dans le cadre du Groupe de Minsk. En tant qu’eurodéputée, je me suis moi-même impliquée dans ce dossier et me suis rendue au Nagorno-Karabakh en 2010, ce qui m’a valu d’être inscrite sur la « liste noire » de l’Azerbaïdjan, « illégalement » selon les autorités du pays. Je tiens à rappeler au Président Hollande qu’il n’y aura pas de résolution durable de ce conflit tant que le régime Aliev continuera de bénéficier d’une impunité internationale soutenue honteusement par l’Union européenne et le Conseil de l’Europe.
Au cours des deux dernières années, l’Azerbaïdjan a engagé ou menacé d’engager des poursuites pénales arbitraires contre au moins 50 militants indépendants ou membres de l’opposition politique, journalistes, blogueurs et défenseurs des droits humains. Plus de 1400 plaintes pour violation des droits humains ont été déposées devant la Cour européenne des droits de l’homme. Et la situation ne fait qu’empirer à l’approche des premiers Jeux européens qui se tiendront à Bakou en juin prochain, comme le révèle un récent rapport de l’Observatoire pour la Protection des Défenseurs des Droits de l’Homme (1). Le 16 avril dernier, Rasul Jafarov, président du Club des droits humains d’Azerbaïdjan, a été condamné à six ans et demi de prison à la suite d’un semblant de procès où aucune preuve d’une quelconque culpabilité n’a été apportée.
Mais pendant ce temps, l’UE et en particulier la France continuent de percevoir l’Azerbaïdjan comme un allié privilégié dans sa stratégie de diversification de ses sources d’approvisionnement en énergie. Car c’est bien notre addiction aux énergies fossiles qui pérennise l’inaction face aux dérives du régime Aliev. Tant que nous ne serons pas fermes sur nos convictions et nos valeurs, nous ne paraîtrons jamais crédibles face à ces interlocuteurs qui n’ont que faire des droits et des principes les plus fondamentaux. La libération de Leyla et Arif Yunus, qui ont été arrêtés notamment parce qu’ils luttaient depuis longtemps pour la réconciliation entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan (2), devrait être au cœur de vos discussion avec Ilham Aliev, et un prérequis pour la tenue des Jeux européens. Une demande de libération immédiate et sans condition par ailleurs exigée par le Parlement européen en septembre dernier (3).»
(1) https://www.fidh.org/IMG/pdf/rapport_azerbaidjan_francais_final.pdf
(2) Les époux Yunus avaient notamment lancé le premier et unique site Internet permettant aux sociétés arménienne et azérie d’échanger publiquement leurs points de vue.
(3) http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?type=TA&reference=P8-TA-2014-0022&language=FR&ring=P8-RC-2014-0090