Comment l’Union européenne peut fixer un salaire minimum décent pour tout le monde ?
Comment se fait-il que nous ne puissions pas payer nos factures alors que nous travaillons 40 heures par semaine ou plus ? Que peut faire l’Union européenne pour résoudre ce problème ? Et qu’est-ce qui changerait s’il y avait un salaire minimum pour tout le monde ?
Joana a 42 ans, elle est mère célibataire d’un petit garçon de 6 ans. Elle travaille dans une boulangerie à Prague, en Tchéquie, d’où elle est originaire. Bien qu’elle travaille à plein temps et perçoive une pension alimentaire de l’État, ses revenus ne suffisent pas à couvrir le loyer de son petit appartement, à fournir une alimentation saine à son enfant ni à payer ses factures.
C’est la réalité de millions de personnes de tous âges et de tous horizons à travers l’Europe. La situation était déjà difficile avant la guerre en Ukraine. Aujourd’hui, l’explosion du coût de la vie plonge de plus en plus de personnes dans la pauvreté – même quand elles travaillent à temps plein dans un emploi stable. En Belgique, par exemple, il faut désormais 33 jours de travail au salaire minimum pour payer sa facture énergétique annuelle.
Alors comment se fait-il que nous ne puissions pas payer nos factures alors que nous travaillons 40 heures par semaine ou plus ? Que peut faire l’Union européenne pour résoudre ce problème ? Et qu’est-ce qui changerait s’il y avait un salaire minimum pour tout le monde ?
Salaire minimum dans l’Union européenne :
comment réduire le grand écart ?
Boîte à outils Salaire minimum # revenu minimum Qu’est-ce que le revenu minimum ? Le revenu minimum est un niveau minimal de revenu que l’Etat décide de garantir à tous ses citoyens et leurs familles. Ses conditions d’octroi peuvent beaucoup varier selon les systèmes en place. Le revenu minimum permet de réduire la pauvreté et de contribuer à garantir des conditions de vie décentes, y compris aux personnes les plus vulnérables exclues du marché du travail. Qu’est-ce que le salaire minimum ? Le salaire minimum est le montant minimum par heure que les employeurs doivent payer à leurs employés. Il est souvent défini par la législation nationale ou par des conventions collectives sectorielles afin que les employeurs ne puissent légalement pas descendre en dessous de ce taux horaire. |
En juillet 2022, le salaire minimum au sein de l’Union européenne variait de 363 euros par mois en Bulgarie à 2 313 euros au Luxembourg. Exprimé en capacité de pouvoir d’achat, le salaire minimum le plus élevé représente presque 3 fois le plus bas. Qu’il soit fixé par la loi ou déterminé par des conventions collectives, le salaire minimum fait le grand écart au sein de l’Union européenne. C’est un véritable casse-tête pour la solidarité du projet européen.
Le groupe Verts/ALE au Parlement européen essaie de corriger cette inégalité et veut assurer un salaire décent aux travailleuses et aux travailleurs. C’est pourquoi nous soutenons la directive sur les salaires minimums adéquats en Europe. Elle appelle chaque État membre à établir un salaire minimum proportionné à son coût de la vie national. Le montant spécifique du salaire minimum sera déterminé au niveau national par une série de critères directeurs, notamment le seuil de pauvreté (60% du salaire médian).
Une directive européenne sur le salaire minimum :
qu’est-ce-qui va changer ?
L’adoption de la directive pour des salaires minimums en Europe prévue, ce 14 septembre 2022, marque une victoire importante pour une Europe plus sociale. C’est la promesse d’une convergence vers le haut où deux-tiers des États membres verront leur salaire minimum augmenter : un impératif pour la cohérence du projet européen et pour lutter contre la pauvreté.
Convaincu·e·s qu’avec cette directive, l’Union européenne a les moyens de devenir un solide rempart contre la crise sociale, les écologistes se sont battu·e·s pour les droits de l’ensemble des travailleuses et des travailleurs sans discrimination. Nous avons réussi à inclure les travailleuses et les travailleurs des plateformes, comme les livreurs ou les chauffeurs Uber, dans la directive. Alors qu’ils sont presque toujours qualifiés d’indépendants et dépourvus de protection au travail, cette directive leur assure au moins le bénéfice du salaire minimum dans leur État membre.
La directive sur le salaire minimum peut-elle répondre aux effets de l’inflation ?
96,5 millions de personnes sont à risque de pauvreté ou d’exclusion sociale aujourd’hui au sein de l’Union européenne. Un chiffre vertigineux qui promet pourtant d’exploser dans les prochains mois.
Face à une inflation annuelle dans la zone euro à 8,9 % en juillet 2022, les salaires minimums doivent garantir un pouvoir de vivre aux travailleuses et aux travailleurs. Il est urgent de les accompagner pour leur assurer un mode de vie dans la dignité.
Sur notre proposition, le recours à un panier de biens et de services à prix réels, participe à définir le seuil de décence d’un salaire durable. Il s’agit d’être dans la réalité quotidienne des travailleuses et des travailleurs européen·ne·s au salaire minimum. Parce qu’ils doivent pouvoir se nourrir sainement ; parce qu’ils n’ont pas à vivre dans des passoires énergétiques ; parce qu’ils n’ont pas à choisir entre accès à Internet ou soins de santé ; parce que la transition vers une économie verte et inclusive ne réussira qu’avec eux ; les États membres doivent adapter leur salaire minimum au coût de la vie.
Qui bénéficiera le plus de la directive sur le salaire minimum ?
Progressivement, 25 millions de travailleuses et de travailleurs verront leurs salaires augmenter de 20% et le taux de pauvreté au travail devrait enregistrer une baisse de 10% grâce à la mise en œuvre de cette directive.
Premières concernées par les bas salaires parce que surreprésentées dans les secteurs les moins rémunérateurs, les femmes bénéficieront particulièrement de cette directive. L’écart de rémunération entre les sexes devrait, en effet, se réduire d’au moins 5% alors qu’il plafonnait à 14,1% pour l’Union européenne en 2019 et n’a que peu changé au cours de la dernière décennie.
Par conséquent, la directive sur le salaire minimum est une victoire massive pour les femmes et les groupes ou personnes vulnérables sur le marché du travail.
Pourquoi la directive sur le salaire minimum renforcera les droits des travailleuses et des travailleurs et l’économie européenne ?
Avec ce texte, nous portons le taux de couverture des conventions collectives à 80% et renforçons les syndicats dans leur rôle. Les travailleuses et les travailleurs à bas salaire ayant un pouvoir de négociation plus faible, ces mesures sont indispensables pour sécuriser leurs droits et réduire les inégalités salariales.
Aujourd’hui, le législateur européen fait la démonstration que l’Union européenne sait réagir en temps opportuns pour faire une réelle différence dans la vie des gens et améliorer la résilience de notre économie et de notre société face aux crises.
Les États membres ont deux ans pour transposer la directive mais, face à l’urgence, nous avons besoin qu’ils agissent maintenant et rapidement. Nous appelons les États membres à prendre les devants et à remplir leur devoir de protection des travailleuses et des travailleurs à bas salaire dans les plus brefs délais.
Pour le groupe Verts/ALE, l’avènement de l’Europe sociale passe par l’accès de toutes les travailleuses et de tous les travailleurs à un salaire minimum décent dans leur pays et de toutes les citoyennes et tous les citoyens européen·ne·s à un revenu minimum. Nous appelons la Commission à faire preuve d’ambition et à proposer au plus vite une directive sur un revenu minimum dans l’Union européenne.
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