Pandora Papers : le Parlement européen tacle le rôle du Royaume-Uni et des États-Unis
Les députés européens ont voté le 21 octobre en faveur d’une résolution sur les Pandora Papers, à la suite des révélations du Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ) sur l’évasion et la fraude fiscales au niveau mondial. Cette résolution est une initiative du groupe des Verts/ALE.
Pour la première fois, le rôle des États-Unis en tant que plaque tournante de l’opacité financière y est dénoncé. La résolution demande aussi que l’accès des services financiers du Royaume-Uni au marché unique soit conditionné au respect par les Britanniques de normes communes en matière de fiscalité et de lutte contre le blanchiment d’argent – une demande des Verts/ALE depuis les négociations sur le Brexit.
Le député européen Damien Carême, membre de la commission des Affaires économiques et financières (ECON), commente :
« Les Pandora Papers montrent clairement que la lutte contre l’évasion fiscale mérite une plus grande ambition dans l’arsenal législatif européen et mondial. Tout dernier exemple en date : l’accord OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques) sur la fiscalité mondiale des entreprises n’est pas assez ambitieux : le taux de 15% n’est pas assez élevé pour combattre réellement l’évasion fiscale et l’accord ne concernera qu’une poignée de multinationales. L’Union européenne doit donc réhausser l’ambition de cet accord. C’est pourquoi, je demande à la Présidence française de l’Union européenne, et à Bruno Le Maire en particulier, de proposer à ses homologues un taux effectif minimum intra-européen d’au moins 21% ainsi qu’un seuil plus bas pour qu’il s’applique à davantage de multinationales. Je demande aussi à Bruno Le Maire de rendre publics les taux effectifs payés par les multinationales actuellement en France.
« Les Pandora Papers ont aussi mis en avant le rôle des États américains qui se comportent aujourd’hui comme de véritables plaques tournantes de l’opacité financière. Il était donc temps que ce Parlement dénonce le rôle des États-Unis dans l’évasion fiscale mondiale, mais ça ne suffit pas : les États-Unis doivent figurer sur la liste européenne des paradis fiscaux tant qu’ils n’adhérent pas aux normes mondiales d’échange automatique d’informations.
Enfin, comme les écologistes le demandent depuis longtemps, il est temps de conditionner l’accès au marché financier européen au respect par le Royaume-Uni de normes communes en matière de transparence fiscale. Je me félicite que cette résolution formule cette demande car on ne peut décemment laisser le Royaume-Uni se comporter comme un paradis fiscal à nos portes. «
Claude Gruffat, député européen, membre de la commission des Affaires économiques (ECON), commente :
« Il est temps de mettre fin au secret financier qui permet aux ultra-riches, aux puissantes multinationales, aux corrompus et aux délinquants de dissimuler de l’argent à l’étranger. Les paradis fiscaux accroissent les inégalités, favorisent la criminalité et sapent les politiques sociales.
Les caisses des États, en Europe et ailleurs dans le monde, sont vides. Il est temps d’aller chercher l’argent où il se trouve pour financer la justice sociale et la transition !
La résolution votée aujourd’hui exhorte les États membres et le G20 à prendre des mesures efficaces pour en finir enfin avec les sociétés écran, véritables chevilles ouvrières du système d’évasion. Des critères obligatoires spécifiques en matière de transparence et d’activité commerciale pourraient empêcher leur utilisation. C’est une bonne chose.
Nous avons aussi besoin de registres publics de bénéficiaires effectifs. La Commission européenne avait suggéré cela en 2016 – les organisations de la société civile et le Parlement européen le préconisent depuis de nombreuses années. Ces registres sont aujourd’hui à actualiser, doivent être rendus libres d’accès et doivent être intégrés dans la liste européenne des paradis fiscaux. Cette mesure est bloquée au Conseil depuis la création même de la liste. »
En savoir plus :
Le rapport appelle à la réévaluation des États-Unis dans la liste des paradis fiscaux de l’Union européenne et demande aux États-Unis de rejoindre la norme commune de déclaration de l’OCDE – l’accord mondial sur l’échange d’informations fiscales. En outre, le rapport va plus loin en recommandant plus d’ambition et, notamment, la publication des informations sur les bénéficiaires effectifs. Le rapport appelle également à une révision urgente de la liste des paradis fiscaux de l’Union européenne.
Certaines des propositions du rapport auront un impact immédiat sur le travail législatif à venir pour la réforme de la législation anti-blanchiment de l’Union européenne, y compris la réforme urgente de la liste des pays tiers à haut risque – connue sous le nom de liste noire anti-blanchiment.
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