Sortons les lobbies du couloir

Exxon Mobil devait être entendu pour déni climatique au Parlement européen. La firme n’est pas venue, alors qu’elle est un lobby très actif, pesant notamment sur la politique énergétique et climatique de l’Union européenne. Michèle RIVASI et Karima DELLI publient une tribune dans Politis suite à cette affaire.

Déjà soumis à une enquête aux États-Unis, le géant du pétrole Exxon Mobil a fait l’objet ce 22 mars d’une audition publique au Parlement européen.

Seul problème : Exxon Mobil n’est pas venu.

Les lobbyistes de la firme se seraient-ils perdus dans les couloirs ?

Après avoir dépensé 30 millions d’euros en lobbying depuis 2010, on aurait pu s’attendre à ce que la firme connaisse un peu mieux les députés européens, pour qui cette absence fait tache d’huile.

Car Exxon Mobil devait être entendu pour déni climatique. Alertée dès 1977 par ses propres scientifiques de l’impact des énergies fossiles sur le dérèglement climatique, la firme a activement dissimulé des informations au public et s’est efforcée de nier le lien entre activité humaine et réchauffement climatique. Le tout, en finançant des campagnes publicitaires et des think tanks ouvertement climatosceptiques.

Le constat est glaçant. Depuis un demi-siècle, et en toute connaissance de cause, Exxon Mobil privilégie ses profits à l’intérêt général, propulsant la planète vers des conditions climatiques remettant en cause la survie de 7 milliards d’êtres humains.

Pourtant, le poison costumé des lobbys est toujours courtoisement invité à palabrer avec nos décideurs. Il expose ses points de vue, ses intérêts, tord la science à son avantage, construit de fausses études, corrompt, menace.

Des documents publiés par une ONG britannique révèlent le travail de sape pratiqué en interne par le Big Five des énergies fossiles : ExxonMobil, mais aussi ses amis de Shell, Chevron, BP et Total.

L’illusion est grandiose. Depuis la COP 21, ces cinq compagnies ont dépensé pas moins d’un milliard de dollars en lobbying et relations publiques ! Mais soyons rassurés : leur prise de conscience écologique est réelle désormais, puisqu’en 2019, pas moins de… 4% de leurs investissements de capitaux prévus concernent effectivement des projets bas carbone. Ridicule, quand on sait que leurs bénéfices ont atteint, eux, 55 milliards de dollars en 2018, année record d’émissions de GES.

Lorsqu’en 2017, la société de produits chimiques Monsanto a refusé d’assister à une audience publique du Parlement européen sur des allégations d’ingérence réglementaire, les parlementaires ont pour la première fois appliqué de nouvelles règles visant à révoquer l’accès au Parlement pour les entreprises ignorant les sommations. Et pour cause : même Volkswagen s’est plié à une audition publique par la commission d’enquête parlementaire sur le scandale de ses voitures diesel frauduleuses !

En conséquence, aujourd’hui, les députés du groupe Verts/ALE exigent le retrait des accréditations d’Exxon Mobil.

Les industries des énergies fossiles parviennent aisément à trouver la porte du Parlement européen lorsqu’il s’agit de freiner l’ambition des politiques climatiques, mais pas lorsqu’ils doivent répondre de leurs actes ?

Qu’ils assument enfin leur irresponsabilité. Excluons-les définitivement des couloirs du Parlement. Qu’ils sortent des bureaux et de dessous les moquettes. L’urgence réclame un ménage clair et franc.

Retrouvez la tribune sur le site de Politis.

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Un commentaire

  • RICARD dit:
     - 

    oui bien sur , dehors tous les lobbyistes !
    mais ils sont bien protégés par le gouvernement actuel
    ce n’est plus acceptables ! . . . . rudgy en est un . . .

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