Stocamine : pour un objectif zéro déchet
Ouvert en 1999, le site Stocamine, à Wittelsheim en Alsace, devait abriter à terme 320 000 tonnes de déchets dangereux non-radioactifs (de classe 1 et 0). Un projet préoccupant quand on sait que le lieu – les anciennes mines de potasses d’Alsace – est situé juste au-dessus d’une des plus grandes nappes phréatiques européennes.
Considéré comme un incident inimaginable, un important incendie a pourtant eu lieu en septembre 2002, provoquant l’arrêt de son activité et la remise en cause du projet. Depuis cette décision de fermeture, il est apparu également qu’une partie des déchets entreposés n’aurait pas dû l’être pour cause de dangerosité excessive. Décision a été prise de déplacer une partie des déchets les plus dangereux tout en misant sur la chance pour que le reste, trop coûteux à atteindre et traiter, ne contamine pas la nappe phréatique à terme.
Contrairement aux partisans du projet, béatement optimistes quant à l’évolution géologique du site à long terme, nous soutenons ses opposants et notamment le collectif Déstocamine qui pointent les risques prévisibles importants, notamment en ce qui concerne les infiltrations et remontées d’eaux. La dépollution ne peut être partielle et l’avenir laissé au bon vouloir du hasard.
Notre courrier à Ségolène Royal, Ministre de l’Environnement, de l’Énergie et de la Mer, chargée des Relations internationales sur le climat :
Nous souhaiterions attirer votre attention sur la situation urgente et inquiétante du site
StocaMine, à Wittelsheim, en Alsace.
Depuis 1999, 44 000 tonnes de déchets ultimes (de déchets de classe 0 et 1) ont été enfouis à 600 mètres sous terre par la société Stocamine, sous le puits Joseph-Else, dans des galeries laissées libres par l’arrêt de l’exploitation des mines de potasse. Depuis 1999, de ce fait, les nappes phréatiques d’une zone allant de Bâle à Mayence et desservant 7 millions de personnes courent un danger de pollution susceptible de nuire à leur alimentation en eau potable. Depuis près de vingt ans, par conséquent, les habitants du bassin potassique et de la région mulhousienne sont exposés à des risques environnementaux majeurs.
Après le grave incendie qui a eu lieu en 2002 (catastrophe réputée impossible) son activité économiquement non rentable n’a pas été poursuivie et a révélé que des déchets non autorisés par le cahier des charges avaient été enfouis.
La population s’est inquiétée, à raison, de ces révélations et attendait le déstockage immédiat des 44 000 tonnes de déchets dangereux enfouis sous leurs pieds à proximité de leur ressource en eau. Mais cette promesse a bien vite été oubliée, et les autorités de l’époque ont voté un amendement taillé sur mesure permettant qu’au bout d’un an d’inactivité les centres de stockage souterrain de produits dangereux deviennent des centres de stockage définitif.
En 2013, une concertation eut lieu avec mise en débat de cinq propositions allant de l’enfouissement de la totalité des déchets au déstockage total : 95% des avis exprimés le furent en faveur du déstockage total. Cent millions d’euros furent provisionnés pour le déstockage partiel et par la suite, vous-même, Madame la Ministre, aviez demandé au liquidateur de déstocker 93% des déchets mercuriels et arséniés.
Malheureusement, les expertises convergent pour conclure à un ennoyage à termes de la mine, les barrages ne faisant que retarder cette échéance. Elles confirment également le risque de pollution de la nappe par remontée des eaux. StocaMine étant en amont et les eaux souterraines et de surface communiquant, ce serait inéluctablement un empoisonnement continu et irréversible de l’ensemble des ressources en eau de la plaine d’Alsace et de tout le fossé rhénan.
En janvier 2015, l’entreprise StocaMine (dont les Mines de Potasse d’Alsace sont l’un des actionnaires principaux) a déposé son dossier de fermeture. L’enquête publique qui s’en est suivie fin 2016 a montré l’opposition massive des habitants, des associations et des élus de tout parti politique à l’autorisation de stockage illimité des déchets et à leur confinement au fonds du puits de Joseph Else. Contre toute attente les commissaires enquêteurs donnent un avis favorable avec réserves impératives au projet soumis à l’enquête publique.
Le préfet doit désormais publier sa décision dans quelques jours. C’est pourquoi nous vous demandons, Madame la Ministre, de poursuivre votre action sur ce dossier en donnant instruction au préfet de refuser le stockage illimité des déchets et d’aller vers le déstockage total et urgent des déchets. D’après les experts, cette solution non seulement pourrait se faire à un coût moindre que celui annoncé pour le déstockage partiel mais éviterait surtout des risques de pollutions certains de l’environnement et une mise en danger de la santé des habitants vivant au-dessus de la plus grande nappe phréatique d’Europe.
En espérant pouvoir compter sur votre diligence sur ce sujet, nous vous prions, Madame la Ministre, de bien vouloir recevoir l’expression de nos salutations distinguées.
Yannick Jadot, Député européen
Edouard Martin, Député européen
Michèle Rivasi, Députée européenne
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