Yves Cochet : « Nous entrons dans une société de l’après-pétrole »
Il suffit de faire une analyse factuelle de la situation pour se rendre compte que le grand fleuron de l’industrie française – les légendes de Peugeot ou Renault – n’a effectivement pas d’avenir. Le « peak oil », c’est à dire le pic de production mondiale de pétrole, est dépassé en ce qui concerne les hydrocarbures conventionnels, le pétrole accessible par simple forage, le plus pur et le moins visqueux. Ce pic de production n’est pas encore dépassé pour les hydrocarbures non conventionnels, comme par exemple les sables bitumeux en Alberta au Canada dont l’extraction détruit littéralement l’environnement, ou encore les forages off-shore au large de la Guyane. L’extraction devient donc de plus en plus compliquée et coûteuse !
De cette course au pétrole résulte une augmentation du coût du baril. Entre 1915 et 1972, le prix du pétrole était constant à 20 dollars le baril, il est aujourd’hui à 100 dollars le baril. Dans ce contexte, faut-il continuer d’encourager la production de voitures à moteur à explosion en France ? Je crois que ce n’est pas raisonnable. Nous entrons dans une société de l’après-pétrole et il faut que chaque individu, en France et dans le monde, envisage de réduire son utilisation de la voiture. Actuellement, une personne parcourt environ 14 000 kilomètres par an dans son automobile. Les véhicules censés consommer moins de carburants – les fameuses « deux litres au cent kilomètres » – ne nous encourageront pas dans ce sens… Au contraire, elles n’auront pour effet que d’inciter encore les citoyens dans le « plus vite » et « plus loin ».
La voiture électrique pourrait-elle représenter une alternative au moteur à explosion ?
Si on fait le bilan thermo-dynamique de la voiture électrique, il est pire que celui d’une voiture à moteur à explosion. Pourquoi ? Car le pétrole est une ressource incroyable, certes extrêmement polluante et émettrice de gaz à effet de serre, mais c’est un véritable concentré en énergie. Nous n’aurons jamais le même rendement avec une voiture électrique : on ne sait pas faire de bonnes batteries – d’ailleurs la production de celles-ci est très polluante. Ne faisons pas une nouvelle erreur industrielle ! L’ensemble d’une filière doit être prise en compte, du puis à la roue, et la production locale est encore la moins polluante. Évidemment, il faut un parc électrique pour les handicapés, le transport des personnes âgées et pour équiper les services publics par exemple. Mais pour le grand public, elle ne représente pas la solution.
Quelle solution préconisez-vous ?
Il faut développer une offre de mobilité alternative. Nous ne sommes pas dans les nouveaux défis technologiques, mais dans le redéploiement des modes de transport collectif qui ne seraient pas chers, voir complètement gratuits. Alors qu’il faut des années et plusieurs milliards d’euros pour construire des métros ou des trams, il est possible de compter sur des infrastructures moins lourdes comme les bus par exemple. Une ligne de bus est disponible en six mois et constitue une vraie alternative à la bagnole.
Un commentaire
Très clair, et réaliste.
Il faudra et il faut déjà, se déplacer moins, et ne le faire que lorsque c’est braiment nécessaire. Autant que possible rester proche de son activité principale, penser l’habitat en conséquence. La marche à pied et le vélo ne sont pas des alternatives ridicules.
La vie sans auto n’est pas une horreur, c’est un avenir probable…. préparons nous, nous n’en vivrons que mieux.