Audition de M Moscovici : mention passable, sans enthousiasme
Passées les deux premières heures de réponses superficielles, M. Moscovici a dû préciser ses idées suite à l’insistance de plusieurs eurodéputés.
Fortement critiqué pour la politique qu’il a menée en tant que ministre de l’Economie en France, M. Moscovici a tenté de rassurer les eurodéputés qu’il ne serait pas l’homme de « Paris » dans le Collège des Commissaires mais veillerait bien à l’application des règles – maintes fois bafouées par la France – et veillerait à l’intérêt général européen.
Gageons d’ailleurs qu’il prenne le Parlement européen plus au sérieux que lorsqu’il était ministre de l’Economie, période où il avait la fâcheuse habitude de décommander de manière impromptue sa présence devant les eurodéputés.
Parce que les conservateurs du PPE craignent un rejet de leur candidat au Climat/Energie, l’Espagnol Miguel Arias Cañete, ceux-ci ont exigé que le vote sur M. Cañete qui a été auditionné hier soit postposé à lundi et qu’il ait lieu en même temps que celui de M. Moscovici. Autrement dit, ce type de manigance vise à lier le sort de ces deux Commissaires de sorte qu’aucun des deux grands groupes n’osera ne pas soutenir le candidat de l’autre groupe par peur de représailles pour son propre candidat. Cela peut expliquer que, sur le fond, M. Moscovici ait insisté sur son orthodoxie économique. A la manière du candidat Hollande qui, en son temps, avait promis de renégocier le traité européen d’austérité mais était vite rentré dans le rang, il ne faudra donc pas attendre de M. Moscovici un changement de cap par rapport aux grandes lignes définies depuis le début de la crise par l’Allemagne et qu’aucun gouvernement n’a osé remettre en cause, en dépit de critiques exprimées par le FMI ou l’OCDE et plus récemment le gouverneur de la BCE.
Les Verts se réjouissent que, dans la foulée de l’engagement pris hier par Marianne Thyssen, Commissaire désignée à l’Emploi, de donner plus d’importance aux objectifs et indicateurs sociaux dans la gouvernance économique, M. Moscovici ait abondé en ce sens et annoncé que la réforme desdits six-pack et two-pack aura bien lieu en 2014. La Commission sera donc fermement attendue sur ce terrain.
Enfin, concernant la fiscalité, l’un des grands chantiers incontournables pour remettre l’Europe sur les rails et lutter contre les inégalités, et interrogé par Philippe Lamberts, co-Président du Groupe des Verts, qui pointait l’obstacle de la règle de l’unanimité, M. Moscovici a répondu qu’il fallait :
« Désensabler » une série d’initiatives législatives actuellement bloquées (taxation de l’énergie, assiette commune de l’impôt des sociétés,…)
Obtenir un succès sur la coopération renforcée avec la taxe sur les transactions financières (taxe qu’il s’est pourtant évertué à affaiblir et qu’il entend limier à « certains produits dérivés » alors qu’ils devraient tous être visés, ainsi que les obligations et transactions en devises) ;
Utiliser le semestre européen pour faire avancer l’harmonisation fiscale « dans certains domaines ».
Nulle question donc d’un taux d’impôt minimum sur les sociétés.
Les Verts soutiendront la désignation de M. Moscovici lors du passage au vote. Cependant, si son engagement pro-européen semble incontestable, nous serons vigilants à ce qu’il passe à des actes concrets, notamment sur les plans de la fiscalité et de la démocratisation et du rééquilibrage de la gouvernance économique.
Philippe Lamberts,
Eurodéputé Ecolo, co-Président du groupe des Verts