Chypre a besoin d’un avenir durable et de la solidarité européenne
Dans ce contexte, l’accord trouvé le 25 mars au matin est à saluer. Il supprime les points les plus problématiques de l’accord du 18 mars (taxation des dépôts inférieurs à 100.000 €) et inclut des avancées positives : résolutions de Laiki Bank et de Bank of Cyprus sur la base d’un bail-in, fourniture de prêts de la Troïka (FMI, BCE, Commission européenne) uniquement destinés à des mesures budgétaires et en échange d’un Protocole d’accord, imposition d’une réduction du secteur financier chypriote (qui doit atteindre la moyenne de l’UE d’ici 2018), engagements sur des mesures structurelles, augmentation des impôts sur les sociétés et audit indépendant de la réglementation anti-blanchiment.
Ce nouvel accord, qui reste encore fragile, a incontestablement deux aspects positifs : en taxant les détenteurs d’actions et d’obligations, il permet de faire payer les vrais responsables de la banqueroute bancaire tout en affirmant la solidarité européenne. Mais il doit nous conduire à nous interroger, plutôt qu’à nous féliciter.
La première des questions concerne la cohésion de la zone euro. Chypre a été acceptée dans l’euro, avec la coupable complicité des ministres des Finances européens, parce que, d’une part, sa petite taille n’en faisait pas un « pays systémique », et d’autre part, elle remplissait les critères requis (dette, déficit). Il ne s’agit pas ici de remettre en cause l’appartenance de Chypre à l’euro, mais de revenir sur ces deux points: le caractère systémique des banques chypriotes est aujourd’hui évident, et l’exclusion, dans les critères d’adhésion à l’euro, des questions de convergence fiscale et de blanchiment d’argent a produit des bombes à retardement pour l’ensemble de la zone.
La deuxième question à se poser est celle de l’avenir de Chypre. A court terme, les solutions esquissées dans l’accord du 25 mars apportent l’aide nécessaire. Mais à moyen terme, les perspectives de soutenabilité des finances publiques chypriotes, telles que proposées par l’Eurogroup (c’est-à-dire d’ici 2020), sont absolument intenables. Il apparaît aujourd’hui clair qu’une réduction massive du secteur bancaire et financier aura un impact sérieux sur le PIB chypriote, sur sa croissance, et en conséquence, sur le chômage, ce qui rendra extrêmement difficile toute politique d’ajustement budgétaire. Comment, dans ces conditions, prétendre, comme le fait l’Eurogroup, que le niveau de dettes de Chypre sera soutenable d’ici 2020? Sur ce point, une révision des objectifs de l’Eurogroup est plus que nécessaire : elle est incontournable.
A long terme, nous, écologistes, plaidons pour une économie chypriote qui puisse s’affranchir de la dépendance à la finance, dont les abus et les risques ne sont plus à démontrer. Nous souhaitons voir Chypre ré-orienter son économie non vers des énergies du passé, mais vers un développement soutenable, qui passe par un investissement massif dans les énergies solaires, éoliennes, dans l’économie de la mer. Pour ce faire, l’Europe a un rôle majeur à jouer. Elle doit proposer à Chypre comme à l’ensemble de l’UE un plan d’ensemble de transition énergétique et de révolution industrielle.
Sans Europe, il n’y aura que des effondrements nationaux à l’image de Chypre (et de la Grèce, du Portugal, et de l’Espagne…).