Cuve de la centrale EPR de Flamanville : « L’ASN a-t-elle le choix de dire NON ? »
Pour se prononcer, les 31 experts (société civile, représentants des industriels, chercheurs, etc.) ont notamment étudié un rapport technique rédigé par l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN). Selon ce rapport, que l’AFP a pu consulter, l’inquiétude majeure réside dans le couvercle de la cuve, alors que l’aptitude du fond n’est pas totalement remise en cause. Selon Reuters, ce groupe aurait conclu à l’aptitude au service de l’équipement, mais les experts auraient toutefois relevé qu’EDF risquait de devoir remplacer rapidement le couvercle de la cuve une fois l’EPR mis en service. L’ASN va maintenant délibérer sa décision provisoire qui sera soumise à la consultation du public cet été, avant la remise en septembre de sa décision concernant l’autorisation définitive de l’utilisation de la cuve défectueuse de l’EPR de Flamanville. Selon les fuites parues dans la presse, l’ASN envisage de donner son feu vert à l’utilisation de la cuve sous réserve qu’une surveillance régulière soit effectuée.
Réaction de Michèle RIVASI :
« L’ASN ne doit pas faire passer les intérêts des industriels avant la protection des populations ! Si l’ASN accepte de valider cette cuve sans changement du couvercle avant le démarrage de l’EPR, cela montrerait que le gendarme du nucléaire ménage les intérêts à court terme d’une industrie en déclin. En effet, EDF et Areva tentent à tout prix que le démarrage de l’EPR de Flamanville ne soit pas reporté, car le démarrage de l’EPR de Flamanville avant 2020 est une condition dans le contrat d’Hinkley Point C et la Commission européenne a fait de l’avis positif de l’ASN une condition suspensive à son feu vert à l’augmentation de capital de 4,5 milliards d’euros engagée par l’Etat français. Je me demande si l’ASN a le choix de dire non ?»
Elle ajoute : « En matière de sûreté nucléaire, on ne peut pas prendre de demi-mesures, il n’y qu’une seule réponse : la cuve et le couvercle doivent être rejetés ! Dans le cas contraire l’ASN va reporter le problème et augmenter les risques : comment les contrôles nécessaires vont-ils être assurés ? Est-ce qu’EDF est en mesure de le faire? Et que va-t-il advenir du couvercle radioactif ? »
Michèle Rivasi conclut : « Avant de se presser pour répondre aux enjeux financiers d’EDF et AREVA, nous devons nous concentrer sur une transparence totale de ce dossier. Areva et Edf doivent rendre des comptes sur la quasi-absence d’informations précises sur les graves problèmes qui affectent la cuve de l’EPR de Flamanville et également les générateurs de vapeur. Je demande que tous les documents soient publiques : tant les réponses d’Areva et d’EdF aux courriers de l’ASN, que la publication des scénarios alternatifs au cas où la cuve n’était pas bonne pour le service et les résultats des essais sur la résistance de la cuve.
Il faut continuer à garder un œil sur l’affaire du Creusot qui est une affaire européenne. De nombreuses pièces produites depuis 1965 dans l’usine Creusot ont été exportées en Europe et dans le reste du monde. En janvier dernier, j’ai alerté les autorités nationales de sûreté et certains pays ne m’ont toujours pas répondu comme la Suède et l’Espagne qui possèdent vraisemblablement des centrales nucléaires utilisant des pièces défectueuses[1] ».
[1] Un retour sur les lettres envoyées aux autorités de sûreté nucléaire suite à la découverte de pièces défectueuses originaires de l’usine du Creusot est disponible sur : http://www.michele-rivasi.eu/medias/communiques/retour-sur-les-lettres-envoyees-aux-autorites-de-surete-nucleaire-suite-a-la-decouverte-de-pieces-defectueuses-originaires-de-lusine-du-creusot/
Photo : Frédéric BISSON / Licence CC BY 2.0