Directive Fonds Spéculatifs: Les Verts au PE votent contre des règles qu’ils estiment insuffisantes
Philippe Lamberts, membre de la commission économique et monétaire du PE estime que :
« Si la directive va permettre d’accroître la transparence des fonds, le texte final ne donne pas satisfaction au Parlement sur des demandes-clés et se révèle au final en retrait de la proposition initiale de la Commission. La position votée en Commission des affaires économiques du Parlement était nettement plus européenne et régulatrice. Le Groupe des Verts aurait été favorable à un vote en première lecture sur cette base. »
Pour autant, le Parlement aura contribué, grâce à son travail actif et notamment celui de son rapporteur, à améliorer la version finale du texte. Ainsi, il a obtenu un encadrement strict des rémunérations des gérants de fonds.
De même, l’action du Parlement aura permis que les fonds commercialisés dans l’Union européenne soient nécessairement localisés dans des pays assurant un échange effectif d’informations, non seulement en matière prudentielle mais aussi fiscale. La version du Conseil adoptée en mai 2010 n’incluait aucune condition fiscale, en totale incohérence avec les discours des Etats sur les paradis fiscaux…
Les principales critiques du Groupe des Verts au PE sur la directive portent sur les points suivants :
Les investisseurs européens (une banque, une compagnie d’assurance, un fonds de pension…) pourront toujours acheter des parts de fonds spéculatifs qui ne respectent pas les dispositions de la directive. Ces fonds ne pourront pas être commercialisés « activement » dans l’Union, mais rien n’empêche un investisseur d’acheter quand même ces parts de fonds directement à l’étranger. C’est un trou béant dans la législation car, dans ce cas, aucune information ne sera transmise aux régulateurs qui ne pourront ainsi pas évaluer l’exposition au risque systémique des investisseurs européens.
La directive ne se donne pas les moyens de contrôler vraiment le levier d’endettement utilisé par les gestionnaires de fonds. Or, c’est bien ce levier qui est à l’origine du risque systémique porté par les fonds spéculatifs. En vertu de la directive, les gestionnaires de fonds ont maintenant l’obligation de définir un levier maximum. C’est un progrès. Cette information est transmise aux autorités nationales du pays où le gestionnaire est enregistré. Mais rien dans la directive n’oblige l’autorité à agir lorsque le levier est excessif. De plus, l’autorité européenne des marchés financiers (ESMA) n’aura pas le pouvoir d’obliger l’autorité nationale à agir. Au lieu d’assurer un cadre régulateur commun, la directive organise potentiellement la concurrence par le bas entre autorités nationales sur ce critère-clé. Rien n’empêchera donc les gestionnaires de choisir leur pays d’enregistrement au regard de la bienveillance des autorités nationales sur ce point…
La directive accorde un passeport aux fonds situés dans les pays tiers, mais elle ne donne pas aux autorités européennes les moyens de s’assurer du respect du texte par les gestionnaires situés dans les pays tiers. Les gestionnaires-tiers ont les mêmes règles à respecter que les gestionnaires UE mais sans « police » pour vérifier qu’ils les respectent vraiment !
La directive n’empêche pas le dépeçage des entreprises par les fonds de private equity qui pourront toujours remonter les réserves de l’entreprise rachetée pour rembourser leur dette. Cette pratique, qui est clairement un détournement de l’esprit du private equity, n’est pourtant d’aucun intérêt pour le développement des PME européennes. Malheureusement, l’Europe échoue à protéger les salariés contre les pires pratiques des fonds d’investissement.