Entretien dans la revue Projet: Vers un contre-pouvoir aux banques ?
En juin, vous avez lancé, avec 22 eurodéputés en charge de la régulation de la finance, un appel à la constitution d’un contre-pouvoir au lobby financier. Dans quelle intention ?
J’ai été élu en juin 2009. Après six mois de mandat, j’ai constaté que j’avais reçu quasiment tous les jours une sollicitation d’un lobby, représentant des intérêts collectifs, comme l’association européenne des banques, ou émanant d’une entreprise comme Bnp Paribas ou Deutsche Bank, pour faire entendre leur point de vue sur les réformes financières en cours. En face, personne n’était venu frapper à ma porte pour défendre de manière détaillée d’autres propositions au sujet des directives en discussion, que ce soit sur les fonds spéculatifs, l’encadrement des bonus des traders ou les produits dérivés. Certes, il existe une expertise académique et des rapports d’Ong sur ces sujets, mais il manque une expertise appliquée au processus législatif. C’est un métier qu’on appelle lobbying. Dans le domaine financier, en Europe, ce lobbying de la société civile n’existe pas.
Face à cette asymétrie radicale, qui oppose une industrie aux moyens illimités à une désorganisation assez flagrante, j’ai souhaité prendre une initiative qui contribue à restaurer une forme d’équilibre. En matière sociale, de santé publique, de droits de l’homme, d’environnement ou de développement, la société civile est organisée, capable de tirer profit des opportunités dans les textes législatifs pour faire valoir son point de vue. C’est cette construction-là que nous voulons susciter dans le champ financier. Cette initiative se devait d’être transpartisane, car sans être d’accord sur tout, les élus signataires font le même constat. Nous sommes tous soumis à une pression unilatérale : cela ne veut pas dire que l’on y cède, que l’on n’a pas d’argumentaires à lui opposer, mais que manquent des appuis, des relais dans la société civile pour faire vivre le débat public sur ces questions.
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