« Panama Papers : Le paradis fiscal de Jean Claude Juncker », nouveau rapport des écologistes
Les scandales tels que les Offshore Leaks (2013), Lux Leaks (2014), Swiss Leaks (2015), Panama Papers (2016) et les récentes Malta Files (2017) ont révélé l’impressionnante montée en puissance d’un nouveau secteur au niveau mondial : celui de l’évasion fiscale, de la soustraction à l’impôt et du blanchiment d’argent.
Malgré plusieurs enquêtes parlementaires aux conclusions concordantes et les preuves apportées de la complicité de certains États membres de l’UE, personne n’a à ce jour été tenu pour responsable de ce scandale. Même l’autoproclamé « Monsieur Propre » Jean-Claude Juncker, ancien ministre des Finances et Premier ministre du Luxembourg, refuse d’endosser la moindre responsabilité alors qu’il est de notoriété publique que le Luxembourg, par le biais de rescrits fiscaux particulièrement arrangeants, a aidé de nombreuses multinationales à se soustraire à l’impôt dans d’autres pays de l’Union.
Étrangement, tandis que le sujet des arrangements fiscaux est largement débattu ces derniers temps, notamment en ce qui concerne l’aide aux individus cherchant à échapper à l’impôt sur le revenu chez eux, le rôle du Luxembourg et de son omniprésent ministre des Finances et Premier ministre a toujours été négligé.
Alors que, mardi 30 mai 2017, M. Juncker est convoqué par la Commission d’enquête sur les Panama Papers, le Groupe des Verts/ALE publie un rapport montrant comment le Luxembourg s’est employé, entre 2003 et 2005, à bloquer une réforme importante de lutte contre l’évasion fiscale : la directive sur la fiscalité de l’épargne, qui proposait une transmission automatique d’informations fiscales entre États membres. Au final, le Luxembourg a obtenu une concession majeure : au lieu de transmission automatique d’informations, il fut autorisé la perception d’une retenue à la source déduite des intérêts gagnés au Luxembourg, partiellement transmise au pays de résidence dans l’UE.
Le comportement du Luxembourg a été d’autant plus préjudiciable pour ses voisins que le Grand-Duché a toléré la création d’un véritable marché de l’évitement fiscal sur son territoire, aidant des individus à transférer la propriété de fonds dans des compagnies offshore, domiciliées dans des paradis fiscaux, loin de toute juridiction européenne compétente.
En se basant sur des données de la Banque des Règlements Internationaux, les Verts ont réussi à identifier comment le Luxembourg est devenu ce pays accueillant pour les contribuables désireux de contourner les législations, quels mécanismes ont été utilisés et proposent une méthode pour évaluer le coût de ces pratiques.
En plus de propositions, spécialement à destination du Conseil des États Membres, nous demanderons à M. Juncker s’il est prêt à endosser la responsabilité de ces pratiques et s’il s’engage réellement pour favoriser la justice fiscale en Europe.
Pour EVA JOLY, Vice-Présidente de la Commission d’enquête PANA :
« Notre rapport montre clairement qu’entre 2003 et 2005, le Luxembourg, dirigé par Jean-Claude Juncker à la fois Premier Ministre et Ministre des finances, a été l’un des principaux acteurs de l’affaiblissement de la directive sur la fiscalité de l’épargne. Une directive importante contre la lutte et la fraude fiscales grâce à l’échange automatique d’informations sur les revenus de l’épargne au sein de l’UE.
Après avoir obtenu un statut privilégié lui permettant d’appliquer une retenue fiscale minimale au lieu d’échanger l’information avec ses partenaires européens, le Luxembourg a érigé la concurrence fiscale déloyale en véritable modèle d’affaires pour devenir un paradis fiscal au service de riches épargnants européens, en particulier allemands. Le Luxembourg a également bloqué la révision de la directive de 2008 à 2014 afin de protéger son secret bancaire.
Jean-Claude Juncker a beau chercher à nier les évidences, la guerre fiscale a bien été le mode opératoire du pays qu’il a dirigé pendant très longtemps. »
Déclaration de Philippe LAMBERTS, Président du groupe Verts-ALE :
« Notre rapport établit la corrélation entre le régime particulier d’application de la directive au Luxembourg et l’augmentation des dépôts ainsi que des prêts de citoyens étrangers dans cet État membre.
Au-delà de ce régime d’application déjà très avantageux pour les riches épargnants, le contournement des règles fiscales européennes par le Luxembourg via la création de sociétés offshore a conduit à une perte fiscale très importante. Pour les dix pays analysés (Allemagne, Belgique, Danemark, Espagne, France, Royaume-Uni, Italie, Pays-Bas, le Portugal et la Suède) celle-ci est évaluée à 354 millions d’euros entre le 1er Juillet 2005 et le 31 décembre 2016.
Ces pratiques privant des partenaires de recettes fiscales précieuses et minant la confiance entre États mais également celle des citoyens n’ont pas lieu d’être dans une Union digne de ce nom. »
Notre rapport (en anglais) :
Photo : © European Union 2015 – European Parliament