Le CETA, cheval de troie d’un TTIP moribond
Maude Barlow en est convaincue : « Le Canada est aujourd’hui dévasté par plus de 20 années de libre-échange. Le gentil Canada que les Européens ont en tête n’existe plus depuis longtemps. ». Les négociateurs du CETA le savent et ne se privent pas de jouer avec cette image pour faire passer la pilule. Au début des années 1990, il y avait encore 26% d’emplois dans l’industrie. Aujourd’hui, il n’en reste plus que 11%. Les entreprises nord-américaines se sont délocalisées vers le Mexique et 43 000 sociétés états-uniennes ont fait le siège du Canada. Les inégalités sociales ont littéralement explosé.
Sous l’emprise de l’accord commercial signé avec les Etats-Unis et le Mexique en 1994, les Canadiens font depuis longtemps la douloureuse expérience de l’ISDS, ce système judiciaire privé qui permet aux entreprises d’attaquer les États qui prennent des lois contraires à leur business. Ils ont déjà dû débourser plus de 1,7 milliards de dollars pour payer des dommages et intérêts à des multinationales. L’entreprise Lilly, leader mondial de la production de médicaments, demande par exemple 500 millions de dollars d’argent public pour le non renouvellement du brevet d’un de ses produits.
Incapable d’affronter la concurrence américaine, l’agriculture familiale s’est effondrée au bénéfice des fermes-usines. Les outils de régulation des marchés, comme le Wheat Board, ont été démantelés. À leur place, les « factory farms » ont poussé comme des champignons vénéneux, faisant du Canada le troisième plus grand producteur mondial d’aliments à base d’OGMs. L’élevage de porc est tellement concentré autour du lake Winnipeg que cette réserve d’eau douce, la dixième plus importante de la planète, n’est plus buvable.
Il y a urgence à lutter contre le CETA, qui viendra très certainement à l’agenda du Parlement européen avant la fin de l’année 2016. Il doit être considéré comme le cheval de Troie des multinationales qui vont l’utiliser pour remplacer l’accord TTIP, dont on voit de plus en plus qu’il a du plomb dans l’aile. Les entreprises américaines basées au Canada sont dans les starting-blocks, prêtes à partir à l’assaut de réglementations européennes qui leur semblent trop contraignantes.
Article publié également sur la page Facebook de José Bové