Le « bilan carbone » des agrocarburants fait débat à Bruxelles

16 juin 2010
Les agrocarburants sont-ils une source d’énergie durable ? La question divise les écologistes et la Commission européenne. Retour sur cette problématique avec Yannick Jadot, eurodéputé Europe écologie.
Les agrocarburants devraient être 35 % moins polluants que des carburants classiques. Cet objectif, la Commission européenne l’a rappelé le 10 juin 2010 dans une « Communication » présentant « les critères de durabilité » du bio-éthanol ou du bio-diesel. Un « bilan carbone » qui ne convainc pas les écologistes européens : « La Commission propose une méthodologie de calcul des émissions de carbone des agrocarburants tout au long de leur cycle de vie imparfaite et inachevée, estime Yannick Jadot d’Europe écologie. Elle oublie la problématique du ‘changement indirect d’affectation des sols’. »

Ce jargon technique cache de nombreuses forêts… menacées de disparition : si les agrocarburants consommés par les citoyens européens ne pourront pas venir ‘directement’ de territoires récemment déboisés – comme le précise la Commission – ils occuperont forcément les terres destinées auparavant à d’autres usages. Ils vont alors chasser les cultures dédiées à l’alimentation, pour lesquelles il faudra trouver de nouveaux espaces cultivables… et éventuellement raser des forêts ! En niant ce phénomène certes indirect, on prend le risque de détruire chaque année des milliers d’hectares de forêts primaires, encore intactes. Un exemple en Malaisie où les agrocarburants sont la première cause de déforestation : les plantations de palmiers (dont l’huile représente entre 4 et 5 % des agrocarburants européens) sont désormais utilisées pour la production de bio-diesel. Hors, il faut également fournir l’industrie agro-alimentaire en huile de palme, d’où le risque de plantations de nouveaux palmiers à la place des forêts. Les premières victimes de ces évolutions agricoles sont les populations locales mais l’impact est également désastreux pour le climat et la biodiversité.

Droit à la terre

En France, la part des agrocarburants dans la consommation totale de carburant, s’élevait à 5,7 % en 2008 (contre 0,7 % en 2003). Avec l’Allemagne ou la Slovaquie, elle fait partie des pays qui font le plus usage des agrocarburants. En 2008, la moyenne européenne se situait à 3,4 %. Après avoir été considérés comme une solution miracle, ils sont désormais fortement critiqués car les conséquences néfastes de leur utilisation sont nombreuses : le prix des produits alimentaires gonfle, les expropriations se multiplient et posent la question du droit à la terre des populations, en Argentine ou en Brésil, face à la déforestation.

En dépit des craintes de plus en plus partagées par le grand public et les experts, le paquet-climat a continué à encourager l’utilisation des agrocarburants en 2008. La directive ‘énergies renouvelables’ a donc fixé l’objectif – contraignant – de 10 % d’énergies renouvelables dans les transports d’ici 2020. Pour limiter les impacts négatifs des agrocarburants dans ce nouveau cadre législatif, le Parlement européen a réussi à imposer la notion de « critères de durabilité » : seuls les agrocarburants respectant ces critères pourront compter dans l’objectif des 10 % et bénéficier de subventions des Etats. Le feuilleton n’est donc pas terminé : les critères choisis permettront de « certifier » les « bons » agrocarburants pour les différencier des « mauvais ». Mais la question de « l’utilisation ‘indirecte’ des terres » reste au cœur de la mésentente. Prochaine étape : une étude que présentera la Commission européenne précisément sur ce thème avant la fin de l’année 2010.

-Découvrez la campagne pour le Climat des eurodéputés Europe écologie et du groupe des Verts/Ale.
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Un commentaire

  • jess dit:
     - 

    Pour les agrocarburants de 1er génération, non seulement le bilan carbone n’a rien de très intéressant, mais le bilan écologique, lui est carrément désastreux…

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