Prolongation de la durée d’activité des centrales nucléaires : le gouvernement portera la responsabilité d’un accident majeur
« Cette annonce est catastrophique à bien des égards et souligne encore une fois à quel point notre dépendance à l’atome met en danger l’avenir de la France et des Français, sans parler de nos voisins européens.
Ségolène Royal s’adresse avant tout au monde de la finance avec une telle annonce : EDF a abaissé son dividende 2015 après une chute de 67,9% de son bénéfice annuel, et son endettement dépasse les 37 milliards d’euros. Pire, pour la première fois depuis son introduction en Bourse en 2005 (au prix de 32 euros) le titre EDF est passé sous la barre des 10 euros la semaine dernière. Une situation économique désastreuse liée à une mauvaise gestion de l’État d’un groupe assurant pourtant un service public indispensable. En cherchant à imposer le projet Cigeo, en forçant EDF à racheter la branche réacteurs d’Areva et en l’obligeant à investir dans le futur fiasco de l’EPR d’Hinkley Point, le gouvernement français a mis EDF au pied du mur.
Il n’y avait donc plus d’autre choix pour empêcher l’effondrement du colosse aux pieds d’argile. Pendant des années on a rendu l’énergie nucléaire compétitive de manière artificielle, grâce aux subventions publiques et en éludant la question de la gestion des déchets radioactifs et du démantèlement. Aujourd’hui, la France est le mauvais élève européen du nucléaire: alors que les autres pays ont provisionné en moyenne 56% des frais liés au démantèlement des centrales et à la gestion des déchets radioactifs, la France n’est qu’à 31% (1). Ségolène Royal ment donc de manière éhontée lorsqu’elle assure que nos centrales sont amorties, et c’est bien parce que l’État a légitimé l’atome par un prix de l’électricité artificiellement bas que nous nous retrouvons dans cette situation.
En conditionnant cette prolongation au feu vert de l’Autorité de sûreté nucléaire, le gouvernement joue un jeu dangereux. Son Président a pourtant averti à maintes reprises que l’ASN ne disposait pas d’effectifs suffisants pour bien effectuer son travail : nous ne pouvons nous pourtant permettre d’avoir une sûreté nucléaire au rabais, c’est une fuite en avant.
Le plus inquiétant dans cette annonce de prolongation, c’est qu’elle est en contradiction complète avec les objectifs fixés par la loi de transition énergétique : pour respecter l’objectif de diminuation de la consommation énergétique et le seuil des 50% d’électricité d’origine nucléaire à l’horizon 2025, nous devrions fermer de 17 à 20 réacteurs et non pas les prolonger. C’est donc un renoncement de plus, celui de trop ».
Et Michèle Rivasi de conclure :
« Pour sauver EDF, l’État est prêt à faire peser le poids d’un accident nucléaire sur le dos du contribuable, au mépris de la santé et de l’avenir des citoyens français et européens».
(1) À titre d’exemple le provisionnement s’élève à 100% pour la Grande-Bretagne, 94% pour les Pays-Bas et 83% pour l’Allemagne