Tampons, des règles opaques
De plus en plus suspectées de causer des chocs toxiques, les protections périodiques sont dans le collimateur. Que contiennent-elles vraiment ? Les industriels ne jouent pas la transparence, profitant du statut non médical des tampons et de normes pas très sourcilleuses.
Le 25 novembre 2015, Sarah, 19 ans, est victime d’un syndrome de choc toxique (SCT). Enfoncée dans le siège passager, elle n’a pas le temps de demander à son père de stopper la voiture et vomit par la fenêtre. En l’espace d’une heure, elle régurgitera par douze fois. Au cours de la journée, d’autres symptômes se manifestent : étourdissements, lèvres et bout des doigts violacés, plaques rouges sur tout le corps. A l’époque, elle ne connaît rien de ce syndrome – pas plus que les médecins – et passe trois jours en soins intensifs. Pourtant, son rapport médical confirmera que celui-ci est directement lié à son tampon hygiénique. Imbibé de sang, il a favorisé la prolifération de staphylocoques dorés qui ont produit une toxine. Cette toxine est alors passée de la muqueuse vaginale au sang, induisant ainsi le choc toxique. Une infection liée à la composante de son tampon ?
Pour l’heure, impossible de le savoir. D’après le Dr Gérard Lina, biologiste au CHU de Lyon qui s’est lancé dans une étude sur les tampons, «le choc toxique réapparaît depuis quelques années, laissant penser que cela pourrait être dû à la composition ou à la forme du tampon, tout comme à une mauvaise utilisation. En tout cas il y a quelque chose d’anormal.» En 1990, aucun cas de syndrome du choc toxique n’était recensé en France. Depuis, on note une recrudescence des signalements de SCT : 5 cas en 2004, 19 en 2011 et 22 en 2014.
Pour répondre aux nombreux bad buzz qui entourent désormais les tampons, un porte-parole de Tampax, le leader du marché des tampons (11 milliards de dollars de bénéfices en 2014), avait annoncé en janvier qu’il donnerait la composition exacte de ses produits au printemps. En réalité, la marque nous affirme qu’elle va juste afficher sur l’emballage les bribes d’informations déjà présentes dans la notice. «Sur le Tampax Compak Active Fresh régulier, par exemple, sera écrit : rayonne, polyester, coton, parfum.» Mais il n’est pas prévu d’aller plus loin. De quel parfum s’agit-il ? D’où vient le coton et comment est-il traité ?
Pétition et faux label
Rien n’a changé. Ni la pétition en ligne demandant à Tampax plus de transparence, lancée par une étudiante, Mélanie Doerflinger, et aujourd’hui signée par 260 000 personnes. Ni le cas de Lauren Wasser, mannequin californien amputée d’une jambe en 2012 après une infection causée par l’utilisation d’un tampon hygiénique et qui a entamé une procédure judiciaire contre la marque Kotex. De même, l’étude de 60 Millions de consommateurs révélant la présence de dioxines (polluants industriels) dans deux grandes marques de tampons hygiéniques, ou la détection de pesticides dans 85 % des tampons par une étude argentine n’ont pas réussi à faire bouger les lignes. Il en a pourtant été question à la Commission européenne, lorsque Michèle Rivasi, eurodéputée EE-LV, a évoqué en février 2016 les inquiétudes liées à ces découvertes.
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