Certificats COVID-19 : réaction de David Cormand et Michèle Rivasi

Le Parlement européen a adopté aujourd’hui sa position sur le certificat européen COVID-19. Nous sommes satisfait·e·s de la position du Parlement qui permet d’améliorer de façon significative la copie de la Commission. Les négociations interinstitutionnelles vont maintenant commencer, nous resterons vigilant·e·s et n’accepteront aucun recul sur les questions de discrimination et de respect de confidentialité de nos données.

David Cormand et Michèle Rivasi, co-président·e·s de la délégation ont réagi après le vote.

Cela fait plus d’un an que la crise de la COVID-19 a commencé et que nos vies en sont affectées dans tous les domaines. La plupart des États membres ont adopté des mesures qui restreignent la liberté de circuler afin de lutter contre la pandémie.

Observant que l’argument sanitaire était bien souvent dévoyé au sein des États membres comme justification à tous les renoncements en matière de libertés publiques au profit de dérives sécuritaires, et devant l’absence de garanties concédées, notre groupe a fermement voté contre le projet de passeport vaccinal proposé plus tôt cette année.

Néanmoins, le fait que chaque État conçoive séparément son propre système pour réguler les déplacements transfrontaliers multiplie le risque de discriminations, avec des restrictions lourdes aux personnes. Harmoniser les règles au niveau européen, si c’est fait en responsabilité et en toute transparence, pourrait permettre de réduire la circulation du virus tout en permettant aux Européen·ne·s de retrouver leur liberté et leurs droits fondamentaux. L’enjeu est ici, clairement, de parvenir à un équilibre entre santé publique, mentale et liberté de mouvement.

En toute responsabilité, nous avons donc activement participé aux négociations au Parlement européen, afin que ce projet de certificats européens ne pose pas plus de problèmes qu’il n’en résout. Cela ne sera le cas qu’à certaines conditions impératives : 

 

➡️ Chacune et chacun doit avoir le choix d’y recourir ou non, et le recours à la vaccination ne doit jamais être imposé. 

➡️ Leur unique objet doit être de faciliter les déplacements entre États et non de créer un système qui se déploierait  dans la vie quotidienne de chaque citoyen·ne·s pour les activités internes aux pays membres. 

➡️ Le système doit être exemplaire, particulièrement robuste du point de vue de la protection des données personnelles et garantir qu’il ne se transforme pas en système de surveillance généralisée. 

➡️ L’infrastructure doit être décentralisée, l’alternative papier toujours obligatoirement proposée, aucune centralisation ou rétention des données ne doit être permise. 

➡️ Ce système devra expirer dans un an au plus tard. 

➡️ Les tests, enfin, devront être gratuits afin de ne pas instaurer de discrimination entre les personnes sur la base de leur niveau de vie. 

Nous ne souhaitons pas donner un faux sentiment de sécurité : la communauté scientifique est partagée sur les bénéfices d’un passeport d’immunité. L’Organisation Mondiale de la Santé s’est elle-même exprimée, en l’état actuel des connaissances, contre le recours aux passeports vaccinaux pour les voyages internationaux car les personnes vaccinées peuvent continuer à être infectées et contagieuses. Les recherches sur le coronavirus se poursuivent et les variants changent régulièrement la donne. Être en possession d’un certificat ne doit pas donner un blanc-seing d’immunité ou un privilège. Il ne dispense pas des autres précautions et des gestes barrières. Une flexibilité doit être prévue afin de pouvoir réagir et adapter le système devant de nouvelles données épidémiologiques.

Malgré les incertitudes sanitaires qui persistent et les critiques justement formulées par certains juristes sur cette initiative, nous avons souhaité apporter au texte les meilleurs garde-fous en matière de sécurité publique et numérique afin de prévenir toutes les dérives possibles. 

Plus que jamais, ce virus questionne notre système et nos modes de production. La réponse technique poussée par la Commission ne doit pas être un prétexte à l’accumulation de données personnelles de déplacement et de santé, sans contrôle démocratique. Le fait, d’ailleurs, que l’adoption de ce système se fasse à travers une procédure d’urgence, alors que l’infrastructure numérique recommandée est en cours de discussion et d’élaboration depuis plus deux ans, pose nécessairement question. Il nous met face à notre responsabilité politique. Il nous faut être capables de combiner confiance et vigilance, d’adopter une approche humaine et sensible, qui pondère les risques sanitaires et économiques, mais aussi les risques psychologiques et sociaux.

La responsabilité politique, maintenant, est dans le camp des États membres. La France, en particulier, doit rester au cœur de notre attention. L’intégration annoncée du système de certificats COVID-19 européens dans l’application gouvernementale TousAntiCovid, critiquée l’an passé par les associations pour son coût exagéré et son traitement “centralisé” des données, contredit, d’ores et déjà, les exigences de protection des données exprimées par le Parlement Européen et les défenseurs européens des données. 

L’authentification renforcée des documents électroniques ne doit pas permettre de remettre en cause la confidentialité des données de santé ni faciliter la traçabilité des “volontaires” utilisant cette application. Le champ d’application des usages de ces certificats sanitaires en France, tel que l’envisage et le fixe le gouvernement dans le cadre du projet de loi sur l’état d’urgence sanitaire actuellement présenté au Parlement, semble suggérer que ce dernier est dans une démarche d’accumulation indifférenciée et de centralisation des données sanitaires en complète contradiction avec les recommandations du Conseil européen de la protection des données (EDPB) et du Contrôleur européen de la protection des données (CEPD).

Certaines lignes rouges liées aux droits fondamentaux et à la discrimination ne doivent en aucun cas être franchies. Nous serons vigilant·e·s que ces prérequis impératifs soient respectés dans les prochains trilogues, ainsi que dans le déploiement au sein des États Membres.

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