Damien Carême sur la stratégie industrielle européenne
« L’industrie représente 40% de nos émissions de gaz à effet de serre. Engager sa transition est donc plus qu’urgent. C’est urgentissime !
Pour cela, il faut une stratégie ambitieuse et précise, secteur par secteur ; une stratégie conforme aux objectifs de réduction d’émissions que l’UE s’est fixée. Or, ce n’est pas du tout le cas de la stratégie présentée par la Commission qui sonne creux, énumérant des mesures déjà prévues et proposant d’ajouter à des rapports d’évaluation de nouveaux… rapports d’évaluation.
Ce n’est pas à la hauteur des enjeux !
Le plus préoccupant, c’est que la stratégie semble être laissée aux mains des entreprises elles-mêmes : la Commission fait, en effet, le choix de multiplier ce qu’elle appelle les « alliances industrielles », des sortes de forums, organisés par les industriels eux-mêmes, pour conseiller la Commission dans différents domaines, comme l’hydrogène ou les batteries.
En fait, c’est très simple – et c’est terrible : c’est une nouvelle abdication du politique.
Évidemment, il faut faire la transition avec les entreprises et les industries ! Mais il ne faut pas que la stratégie soit élaborée par les industriels et pour les industriels.
C’est aux responsables politiques de fixer la trajectoire en fonction de l’intérêt général et de l’urgence climatique. D’autant que la Commission a un mandat précis : réduire les émissions de 55% d’ici 2030 et atteindre la neutralité climatique en 2050, au plus tard. Elle devrait donc agir en conséquence.
Fixons, dès maintenant, des trajectoires de réduction d’émission contraignantes et conformes à ces objectifs. Misons sur le déploiement massif des renouvelables et des solutions innovantes. Cessons de nous entêter dans des énergies du passé comme le gaz et le nucléaire.
Même l’Agence internationale de l’énergie, qu’on ne peut taxer d’être écolo-gauchiste, le réclame aujourd’hui !
Il y a 70 ans, la Communauté européenne du Charbon et de l’Acier, la CECA, était créée. C’était une formidable idée que de mettre en commun les ressources-clés de l’époque pour bâtir un avenir collectif et apaisé. Aujourd’hui, ce projet doit nous inspirer. Investissons ensemble, et massivement, dans ce qui garantit notre avenir durable : les énergies renouvelables et l’efficacité énergétique.
Faisons naître une « Communauté européenne post-carbone », une CepCA, avec une approche systémique, plutôt que de multiplier les alliances industrielles, développées en silos et sans cohérence d’ensemble.
Voilà ce qui serait un cadre politique ambitieux pour l’Union européenne.
Voilà la seule stratégie durable, et créatrice d’emplois, pour nos industries. »
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