Impact de la 5G : A qui profite ces nouvelles ondes ?
Où sont les études permettant d’évaluer l’impact sanitaire et environnemental de la 5G ? Quelle infrastructure doit-on privilégier pour limiter les rayonnements de la 5G à un niveau le plus bas possible ? demande l’eurodéputée française Michèle Rivasi (Verts/ALE). Deux rapports officiels parus en Suisse et en Grande-Bretagne, présentés par Michèle Rivasi à l’occasion des tables rondes sur la 5G organisées la semaine passée et cette semaine au Parlement Européen, apportent des éléments de réponse.
L’arrivée annoncée de la 5G est au centre de grandes manœuvres industrielles, financières et technologiques et s’accompagne de promesses mirobolantes, de milliers d’emplois et de nouvelles sources de profit pour les entreprises. Mais le déploiement de la 5G s’accompagne aussi d’un certain nombre de questions encore sans réponses.
QUE SAIT-ON DE L’IMPACT DE LA 5G SUR LE VIVANT ?
Au-delà des seuls bénéfices économiques, nous sommes confrontés à l’inconnue des effets sur l’environnement et la santé. Lorsque j’ai posé la première question écrite sur ce que l’on sait des possibles effets des bandes de fréquences de la 5G sur la santé (1), la Commission m’a répondu qu’une telle étude d’impact n’était « pas considérée comme nécessaire », les avis scientifiques précédents sur la 2G, la 3G ou la 4G n’ayant pas conclu à des risques sanitaires justifiant de réviser les limites d’exposition fixées en 1999. Autrement dit, les nouvelles fréquences de la 5G se développent actuellement sans étude d’impact environnemental ou sanitaire dédié. Sans ces études et sans évaluation de l’impact de la 5G sur le vivant, nous, les politiques, avons le devoir d’appliquer le principe de précaution.
LES SCENARIOS SUISSES POUR LIMITER L’EXPOSITION AUX RAYONNEMENTS 5G
Deux rapports officiels sur la 5G nous donnent pourtant des perspectives de cet impact.
Le premier a été réalisé à la demande des autorités suisses, par un groupe de travail réunissant des médecins, des ingénieurs, des scientifiques pour évaluer l’impact du déploiement de la 5G, en particulier sur l’exposition des populations aux champs électromagnétiques. (2)
La Suisse a ceci d’intéressant qu’elle applique deux limites d’exposition des personnes aux rayonnements électromagnétiques. Vous avez tout d’abord des limites d’immissions, similaires aux recommandations européennes, qui vont de 36 V/m à 61 V/m. Et des limites d’installation de 4 V/m et 6 V/m, pour les populations les plus fragiles, les hôpitaux, les ecoles, etc. et qui se fondent sur le principe de précaution. Toute la question est donc de savoir si la 5G est compatible avec les normes suisses les plus exigeantes actuellement.
Le rapport suisse y répond en élaborant plusieurs scénarios. Trois grands scenarios se dessinent pour respecter les normes de 4 V/m et 6 V/m. Il faut investir dans le premier scénario le plus exigeant la somme de 12 milliards € et déployer 46 500 antennes contre 12 000 actuellement en Suisse. Le deuxième scénario du « statu quo » prévoit d’investir 7 milliards € et installer 24 500 antennes supplémentaires, avec 5000 aménagements. Les opérateurs privilégient eux deux scénarios plus rapides et moins couteux, où les normes limites seraient augmentées, passant à 11,5 V/m ou jusqu’à 20 V/m. L’investissement avoisinerait alors les 900 millions €, c’est à dire 13 fois moins que dans l’option garantissant le respect des limites d’exposition les plus protectrices du public.
Pour ce qui est des effets sanitaires, le rapport suisse constate qu’il n’y a pas assez d’études sur les ondes 5G. L’une de ses recommandations est donc de faire réaliser de toute urgence les études manquantes, notamment sur les effets sanitaires ou environnementaux des ondes millimétriques. Les études manquent et le peu qui existent attirent notre attention sur des risques possibles sur les insectes et la biodiversité. Car l’un des impacts de la 5G, dont l’on parle encore peu pour l’instant, concernent les arbres.
LES FEUILLES DES ARBRES ABSORBENT 90 % DES ONDES MILLIMETRIQUES DE LA 5G
Les arbres et la 5G sont l’objet du rapport commandité par le ministère de la culture, des médias et du digital britannique. (3) Ce rapport paru en 2018 passe en revue les effets de la présence de façades d’immeubles, de mobiliers urbains, de la pluie et des arbres sur la diminution et la propagation d’ondes supérieures à 6 GHz (à 26, 32, 39 et 60 GHz en particulier)… Il constate « dans le cas où il y a du feuillage, la perte est systématiquement de 90% sur toute la gamme de fréquences » !
Cela suppose que si l’on veut installer dans les villes une 5G qui fonctionne et avoir une ville « connectée », il va falloir couper les arbres. Cela me paraît insensé de privilégier la technologie et l’accès au numérique en abattant des arbres, alors que l’on promet dans le même temps de reverdir et de végétaliser les villes pour lutter contre les canicules notamment.
Attention de ne pas inverser les priorités ! Je rappelle à la Commission qu’il est hors de question de mettre en avant la 5G au nom des intérêts de l’industrie sans regarder les effets sanitaires ni les effets sur la biodiversité. D’autres questions se posent sur la facture énergétique globale de la 5G, ou encore de son impact écologique ou de l’extractivisme des terres rares qu’elle entraine. Mais ces rapports faits en Suisse et en Grande-Bretagne soulignent eux aussi l’urgence et la nécessité de produire des études d’impact biologiques et environnemental de la 5G avant tout déploiement à grande échelle !
(1) Évaluation de l’impact biologique et sanitaire de la 5G,
Question écrite du 27 mars 2019
http://bit.ly/Rivasi_Impact_5G
(2) Téléphonie Mobile et Rayonnement : le rapport du groupe de travail suisse
http://bit.ly/Rivasi_RapportSuisse2019_5G
(3) Arbres et 5G : le rapport britannique de 2018
http://bit.ly/Rivasi_RapportUK2018_Arbres_5G