L’ombre de Poutine plane sur le Parlement européen
Lundi 8 juillet, le Rassemblement national a rejoint le groupe « Patriotes pour l’Europe » et Jordan Bardella en a pris la tête, fort des trente député·e·s européen·ne·s de sa délégation, la plus importante de ce nouveau groupe d’extrême droite.
Les orientations politiques et la composition de ce groupe, qui sera le troisième plus gros du Parlement européen, derrière celui du Parti populaire européen (PPE) et celui des Socialistes et démocrates (S&D), ne peut que nous inquiéter.
En effet, non seulement il a inscrit dans son manifeste la lutte contre « l’immigration illégale », la défense de « la famille traditionnelle » et la fin de l’aide militaire à l’Ukraine, mais Viktor Orbán, premier ministre dictatorial de la Hongrie et qui ne fait pas mystère de sa proximité avec Vladimir Poutine, en est le principal artisan. Enfin, clin d’œil appuyé à Donald Trump, le groupe s’est choisi pour slogan « Make Europe great again », qui est aussi le slogan de la présidence hongroise du Conseil qui a débuté le 1er juillet.
Le groupe des Patriotes pour l’Europe assume donc pleinement son orientation pro-Poutine. C’est, d’ailleurs, probablement pour cette raison que Jordan Bardella et Marine Le Pen se sont bien gardés d’annoncer leur ralliement avant le résultat des législatives, tout à leur entreprise de dédiabolisation et de « dépoutinisation » de leur image.
Lors du mandat précédent, nous avons répété de manière régulière nos inquiétudes quant à la capacité de Budapest à assurer la présidence du Conseil, compte tenu de ses manquements à l’État de droit et aux valeurs de l’Union européenne. Par ailleurs, depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie, Viktor Orbán s’est engagé dans un bras de fer contre Bruxelles, en ne cessant de s’aligner sur les positions de Moscou. Nos inquiétudes se sont avérées fondées puisque, depuis le 1er juillet, date de son accession à la présidence de l’Union européenne, Viktor Orbán est allé, sans mandat, rencontrer Vladimir Poutine à Moscou « dans le cadre de sa mission de paix ». Il s’est ensuite rendu en Chine voir Xi Jinping puis au sommet des États turciques, une organisation proche du président turc Recep Tayyip Erdoğan.
Dimanche, les électrices et les électeurs français·es progressistes et républicains se sont mobilisé·es pour empêcher le Rassemblement national d’avoir la majorité absolue à l’Assemblée nationale et d’être en position de gouverner. Elles et ils ont évité ainsi à la France de devenir le vaisseau amiral de l’ingérence de Poutine au Conseil. Nous nous en réjouissons. Pour autant, nous nous inquiétons de l’influence qu’il aura sur les décisions du Parlement européen, via le nouveau groupe des Patriotes pour l’Europe. Nous resterons donc très attentifs à ce que le cordon sanitaire d’usage dans cette institution soit respecté afin de ne donner aucun pouvoir institutionnel et aucun poste clef à ses membres.
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