Semi-conducteurs et autonomie stratégique de l’UE : investissons pour la durabilité

28 novembre 2022

En février 2022, la Commission européenne a annoncé en grande pompe une stratégie pour rendre l’Union autonome en composants électroniques, en particulier en semi-conducteurs. Cette décision répondait à une situation de pénurie de ces composants en Europe, composants pourtant nécessaires dans de nombreuses industries du numérique. Pour le groupe Verts/ALE, David Cormand était, notamment, en charge de négocier les aspects budgétaires de ce dossier, appelé Chips Act.

Sur la base de cette proposition, le Parlement et les différentes commissions parlementaires concernées ont travaillé pour faire évoluer le texte. Ce 17 novembre, la commission des Budgets a adopté son opinion.

D’un point de vue budgétaire, la Commission européenne prévoit un investissement total (public et privé) à hauteur de 43 milliards d’euros. La comparaison avec les autres puissances mondiales est parlante :

  • La Chine a établi un fonds public, sans aide privée, de 28,9 milliards de dollars en 2019
  • Joe Biden a signé la loi CHIPS and Science Act, le 9 août 2022, avec une enveloppe de 52 milliards de dollars destinée à soutenir la fabrication de puces aux États-Unis

La part du budget européen prévu par la Commission pour cette stratégie industrielle est de… 3,3 milliards d’euros. Au-delà des montants très faibles, le réel problème est que cette somme devrait être rassemblée en rabotant les budgets d’autres programmes ! La commission des Budgets était unanime sur le besoin d’argent frais pour financer le Chips Act car cette ambition pour l’Europe ne peut se faire au détriment des programmes existants et qui ont tous leur importance pour l’Union. D’autant plus alors que les marges du budget annuel sont au plus bas et que la guerre en Ukraine ne va pas s’arrêter de sitôt. Notre groupe a donc soutenu les propositions du rapporteur pour limiter au maximum les ponctions dans des programmes existants.

Au-delà des enjeux strictement comptables, David Cormand a été inquiet de la proposition faite par la Commission d’affaiblir la législation environnementale, au prétexte que la fabrication de semi-conducteurs en Europe serait une priorité absolue. David a donc déposé un amendement afin de supprimer l’exemption prévue dans le texte, qui permettrait, par exemple, la construction d’infrastructures sans avoir à se conformer à la directive-cadre sur l’eau et à la directive Habitats ! Malheureusement, nous n’avons obtenu le soutien que des groupes socialistes et gauche, tandis que les libéraux de Renaissance s’y sont opposés, avec la droite. Il nous aura manqué deux voix…

David a déposé plusieurs autres amendements visant à orienter l’utilisation du budget européen vers des investissements vertueux.

La bonne nouvelle est que certains ont été adoptés par la commission des Budgets ! C’est, notamment, le cas de sa proposition pour que l’Union européenne investisse via le Chips Act dans le recyclage des métaux rares pour transformer les déchets électroniques en ressource. Il est capital que l’Union réfléchisse enfin à ses réels besoins numériques, tant notre consommation actuelle est intenable et nous enferme dans un modèle économique extractiviste fatal pour l’environnement.

David avait également à cœur que l’argent européen soit utilisé de façon pertinente et transparente : pour cela il a déposé un amendement visant à donner le pouvoir de contrôle à la Cour des comptes européennes sur la façon dont le Chips Act sera mis en œuvre, en particulier sur les contrats passés et les investissements faits. Ses collègues de la commission BUDG ont validé cette demande.

En revanche, la majorité des député·e·s a rejeté son amendement suggérant d’investir essentiellement dans le développement des puces les plus utiles et les plus répandues, avec des débouchés en Europe (autour de 20nm) et dans les puces pour lesquelles nous disposons d’une expertise unique pour rester leader sur ce segment de marché. Lors de notre échange de vues avec la Commission en mars, il nous a été dit qu’il fallait investir dans les puces les plus fines. Cependant, nous ne pensons pas qu’il s’agisse d’une décision judicieuse car le marché européen n’a pas les capacités d’absorption pour ce type de puces. De plus, d’un point de vue environnemental, les puces les plus larges sont plus facilement recyclables, ce qui n’est pas un détail si nous voulons parvenir à une économie circulaire.

Le résultat final du vote en commission des Budgets est donc en demi-teinte, avec quelques améliorations notables, contrebalancées par le rejet de l’amendement de David le plus important concernant les directives environnementales.

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