Stop aux produits issus du travail forcé en Europe
« Je travaillais sans salaire, seule, de 5h à 23h. de lundi à vendredi » C’est le témoignage d’une femme de 32 ans, travailleuse forcée dans le secteur de la couture, publié par l’Organisation Internationale du Travail en 2023.
Un témoignage qu’on voudrait ne plus devoir récolter. Et pourtant, aujourd’hui le travail forcé fait 28 millions de victimes dans le monde dont 880 000 en Europe. Un chiffre en constante augmentation ces 10 dernières années.
En septembre 2022, l’Union européenne a franchi un pas supplémentaire vers l’éradication du travail forcé. La Commission européenne a publié une proposition pour interdire tout produit fabriqué avec du travail forcé sur le marché de l’Union. Le règlement établit des règles interdisant aux opérateurs économiques de mettre à disposition sur le marché de l’Union ou d’exporter à partir du marché de l’Union des produits fabriqués par le travail forcé.
Rapporteur pour la Commission Emploi et Affaires Sociales, je propose trois innovations majeures pour contribuer à mettre fin à l’esclavage moderne. Mon rapport a été adopté en Commission à une large majorité ce 18 juillet 2023.
Nous avons eu à cœur d’inclure toute la chaine de valeur dans la prise en compte de l’évaluation des produits ; c’est fondamental pour que les services liés au produit final soient eux aussi exempts de travail forcé. On parle des services de transport, de stockage, de nettoyage ou encore de distribution des produits.
Nous avons également créé une présomption de travail forcé pour toutes les zones géographiques ou secteurs d’activités pour lesquels le travail forcé est systématique et diffus. Cela implique un renversement de la charge de la preuve : aux entreprises travaillant dans ces zones ou ces secteurs de faire la preuve qu’elles n’ont pas eu recours au travail forcé. On parle ici de la région du Xinjiang en Chine ou encore de certaines industries comme les diamants de la honte en Afrique ou le coton d’Ouzbékistan.
Il s’agit d’une avancée fondamentale quand on connait la vulnérabilité des victimes et les difficultés qu’elles rencontrent pour fuir et prouver l’existence de travail forcé. Le travail forcé est en effet largement alimenté par les violations des droits humains que sont la discrimination, la pauvreté ou la migration. En matière de preuve et de réhabilitation, c’est le combat du pot de terre contre le pot de fer.
C’est d’ailleurs pour une réelle prise en compte de l’humain que nous avons introduit une obligation de réparation pour les victimes. L’accès à la justice comme l’obligation pour une entreprise fautive de réparer les victimes sont des préalables à toute levée de l’interdiction de mise sur le marché d’un produit.
Le vote en Commission d’aujourd’hui est une belle victoire mais il ne constitue qu’une étape. C’est désormais au Parlement dans son entièreté de confirmer la voie que nous avons tracée pour l’interdiction des produits issus du travail forcé en Europe.
1 https://www.alliance87.org/interactive/modern-slavery-statistics/
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