Une étape cruciale contre l’évasion fiscale des multinationales

Le 11 novembre 2021, le Parlement européen a adopté la directive dite de « rapport public pays par pays ». Il s’agit d’une étape historique vers une transparence fiscale totale des multinationales de l’Union européenne et contre les paradis fiscaux. En vertu de la nouvelle directive, qui devrait entrer en vigueur mi-2023, les multinationales dont le chiffre d’affaires dépasse 750 millions d’euros par an seront tenues de déclarer leurs bénéfices et combien elles paient d’impôts dans chaque pays où elles opèrent. Elles devront également déclarer leur nombre d’employés dans les pays de l’Union européenne et dans les États figurant sur la « liste noire » et la « liste grise » de l’Union européenne des juridictions non coopératives.
Ces mesures, en faveur desquelles le Groupe Verts/ALE lutte depuis de nombreuses années, constituent un outil essentiel contre l’évasion fiscale des multinationales. La prochaine étape doit être de généraliser ces nouvelles règles aux pays en dehors de l’Union européenne. La clause de révision dans 4 ans, obtenue par le Parlement européen, sera l’occasion pour les écologistes européen·ne·s d’élargir le champ d’application pour renforcer ce dispositif.

Damien Carême, député européen, membre de la commission des Affaires économiques et monétaires et de la sous-commission des Affaires fiscales commente :

« Les scandales fiscaux à répétition ont démontré combien la transparence était capitale pour lutter contre l’évasion et la fraude fiscales.
Cet accord est un vrai pas en avant. Pour la première fois en Europe, nous pourrons savoir exactement ce que les multinationales gagnent et combien elles paient d’impôts dans les pays où elles opèrent. Cela devrait marquer la fin des accords de complaisance et des astuces d’évasion fiscale qui entrainent les États membres dans une course au moins-disant fiscal, aux dépens des citoyennes et des citoyens. Les déclarations publiques encourageront les multinationales à mettre fin aux pratiques de planification fiscale agressive, au dumping fiscal et au transfert de bénéfices dont on connait les conséquences dramatiques sur les économies de nos pays.
Nous aurions évidemment souhaité que ce texte aille plus loin, en imposant la transparence sur les données des multinationales partout où elles opèrent, et non pas seulement en Europe, et nous regrettons qu’une fois encore, certains États membres aient bloqué cette législation pendant 4 longues années, quand, partout en Europe les services publics souffrent de sous financement.
Dans 4 ans, nous saisirons l’occasion de la clause de révision pour renforcer cette législation et la rendre encore plus stricte. Nous poursuivrons le travail entamé par nos collègues écologistes des mandats précédents, en luttant en faveur d’une véritable justice fiscale, ciment indispensable de nos démocraties. »

Claude Gruffat, député européen, membre de la commission des Affaires économiques et monétaires et de la sous-commission des Affaires fiscales, commente :

« La transparence fiscale pour les multinationales est la première étape sur la voie d’une plus grande justice fiscale en Europe. La transparence est essentielle pour que les citoyennes et les citoyens, les journalistes et les autorités publiques puissent savoir combien les entreprises gagnent et combien elles paient d’impôts là où elles opèrent. Les pratiques fiscales déloyales des multinationales ont désavantagé les petites et moyennes entreprises (PMEs). La publication de rapports pays par pays peut contribuer à, enfin, égaliser les conditions de concurrence.
C’est un bon premier pas, et un revers pour la France qui s’était fait prendre la main dans le sac, utilisant les notes du MEDEF dans la négociation, pour affaiblir le texte autant que possible.
Néanmoins, grâce à ces nouvelles règles, nos concitoyennes et nos concitoyens sauront combien d’impôts les grandes entreprises paient et où. C’est une victoire qui montre comment l’Union européenne peut agir sur des questions qui intéressent et touchent les citoyennes et les citoyens. Il est regrettable que le Conseil ait refusé d’accepter la publication mondiale des données fiscales pertinentes. Cependant, avec mes collègues, je continuerais de me battre pour que toutes les informations fiscales des grandes entreprises du monde entier soient rendues publiques. Il s’agit d’un pas ferme et positif dans la lutte quotidienne et sans relâche que nous menons contre l’évasion fiscale.« 

 

 

En savoir plus :
Selon les chiffres de Tax Justice Network, les États membres de l’Union européenne sont responsables de 36 % des pertes fiscales mondiales, ce qui coûte, chaque année, aux pays du monde entier, plus de 154 milliards de dollars en impôts perdus. Selon Gabriel Zucman, expert fiscal de renommée mondiale, le reporting public pays par pays couvrirait déjà environ 80 % des bénéfices transférés dans l’Union européenne, qui sont principalement transférés vers des juridictions à faible fiscalité au sein de l’Unio, comme l’Irlande, le Luxembourg et les Pays-Bas.

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