Garantie jeunesse : les moins de 30 ans sans filet face au chômage

14 novembre 2013
En Europe, les jeunes sont les plus durement touchés par la crise. Les taux de chômage des 16-25 ans atteignent des sommets en Espagne, en Grèce, au Portugal ou en France. Les Etats européens doivent intervenir. Avec la Garantie Jeunesse, ils semblent s’engager à lutter contre ce fléau. Mais sans politique de relance et sans budget européen digne de ce nom… le projet risque de rester une coquille vide.
Le 28 février 2013, les Ministres de l’emploi et des affaires sociales des 27 Etats-membres de l’Union européenne votaient en faveur d’une Garantie pour la jeunesse, visant à « offrir la possibilité à chaque jeune citoyen de l’Union européenne (jusqu’à l’âge de 25 ans) de travailler, de suivre un enseignement ou une formation au plus tard quatre mois après son inscription au chômage ou après être sorti du système éducatif. » Alors que 5,6 millions de jeunes sont sans emploi en Europe (23,50 % d’entre eux), cette décision apparaissait comme un excellent signal.

Frappés par la pauvreté

En France par exemple, « les moins de 30 ans sont les plus touchés par la pauvreté avec un taux de l’ordre de 10 % contre 7 % en moyenne, explique l’Observatoire des inégalités. A eux seuls, ils représentent la moitié des personnes pauvres. » Cette pauvreté est la conséquence du bas niveau de revenu des parents, eux mêmes au chômage ou en emplois précaires. Aujourd’hui, les jeunes adultes ne disposent pas toujours de soutien familial… Sans les minima sociaux (il faut avoir 25 ans ou au moins deux ans d’activité pour toucher le Revenu de solidarité active – RSA en France), comment peuvent-ils survivre ? Exploités lors de stages non-rémunérés et non encadrés, comment peuvent-ils accéder à leur premier emploi ? Face aux disparités de leurs origines socio-économiques, comment assurer à tous les jeunes un accès à la formation et l’autonomie financière ?

A nouveau réunis le 12 novembre 2013, lors d’une grande conférence européenne pour l’emploi des jeunes à Paris, les chefs d’Etat et de gouvernement ont renouvelé leur détermination à les y aider, et à lutter efficacement contre le chômage. Ils ont annoncé la somme de 45 milliards d’investissement sur trois ans. Selon l’Élysée, aux 6 milliards d’euros en faveur des régions les plus frappées en 2014 et 2015, s’ajoutent 18 milliards de la Banque européenne d’investissement (BEI) et environ 21 milliards du Fonds social européen (FSE) répartis sur trois ans (2013-2015). Soit 45 milliards consacrés à cet objectif.

Un budget fourre-tout

Alors qu’un budget européen revu fortement à la baisse devrait être adopté prochainement… cette somme laisse rêveur. Pour Karima Delli, eurodéputée EELV, membre de la commission Emploi et Affaires sociales du Parlement européen, il s’agit là « d’un nouvel exercice de communication » : « Ce chiffre est un fourre-tout, dénonce-t-elle, puisqu’il s’agit de financements de projets bien plus larges que ceux dédiés à l’emploi des jeunes. On y trouve les fonds pour la modernisation des services publics de l’emploi, le soutien aux créations d’entreprises, les bourses Erasmus… Quant aux milliards d’euros de prêts de la Banque européenne d’investissement, il s’agit de prêts à taux préférentiels pour aider les entreprises. Encore des cadeaux pour elles, sans contreparties sur la création d’emplois de qualité pour les jeunes ! »

Plutôt que de se congratuler lors du lancement de cette Garantie jeunesse encore floue (les Etats-membres ont jusqu’au mois de décembre pour prévoir son application concrète dans leur pays…) et sans capacité financière réelle, les chefs d’Etat et de gouvernement devraient soutenir des actions politiques fortes à mettre en place partout en Europe. En premier lieu, il faut résoudre la question du revenu minimum. « L’accès aux minimas sociaux pour les jeunes doit devenir un droit inconditionnel et non-discriminatoire. Ils doivent permettre de vivre décemment, et leurs montants ne devraient pas être inférieurs au seuil de pauvreté », précise Malika Benarab-Attou, eurodéputée EELV.

Renverser les politiques d’austérité

Pour créer de l’emploi, il faut aussi commencer par arrêter d’en détruire et renverser les politiques d’austérité qui conduisent à précariser toute une génération : derniers embauchés dans des emplois fragiles et à temps partiels, les jeunes sont les premiers licenciés. Il faut donc investir, grâce aux fonds européens, dans la formation et l’insertion dans les secteurs de la transition écologique. Concentrer les moyens sur l’éducation et les formations les plus élitistes est une erreur, nous devons faire la promotion de l’apprentissage, sur un pied d’égalité avec l’enseignement classique et non comme une voie de garage. La qualité et la décence du travail doit enfin être garanties avec une charte européenne sur la qualité des stages et une nouvelle stratégie sur la santé et la sécurité au travail.

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